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Clonage humain: La «production» d'embryons débutera en novembre

Pauline Gravel

Le mercredi 08 août 2001

Le spectre d'un double qui nous poursuit ne semble plus un fantasme... Le gynécologue italien Severino Antinori a annoncé officiellement hier à Washington devant l'Académie nationale des sciences qu'il procéderait au clonage d'un être humain dès novembre prochain.

Rien ne semble freiner la détermination de ce «Docteur Folamour» qui collectionne les exploits les plus insensés, tels que celui d'avoir permis à une femme de 63 ans de donner naissance à un enfant. Le Dr Antinori aurait même recruté 200 couples à travers le monde prêts à se porter volontaires pour ce projet que la communauté scientifique condamne avec véhémence, à quelques exceptions près. Les Raëliens par le biais de la société Clonaid et le scientifique américain Richard Seed caressent en effet les mêmes ambitions folles. Le médecin italien fait fi de toutes les oppositions et se dit même prêt à aller de l'avant dans des «pays moins rigides sur le plan éthique, [par exemple dans l'ex-URSS] et dans les eaux internationales si besoin».

Le Dr Antinori a déclaré devant l'Académie que la procédure scientifique qu'il concocte dans deux laboratoires secrets mis sur pied par un consortium privé international de scientifiques (parmi lesquels figurent le Dr Panayiotis Zavos, un andrologue grec chypriote naturalisé Américain qui dirige une clinique de traitement de la stérilité dans le Kentucky) sera comparable à celle utilisée pour le clonage de la brebis Dolly. Le noyau d'une cellule du corps (de la peau ou d'un muscle) d'un père ou d'une mère sera transféré dans l'ovocyte (ovule immature) d'une femme dont on aura extrait le noyau. L'embryon qui en résultera sera ensuite implanté dans l'utérus de la mère où il devrait, en principe, poursuivre son développement. L'enfant qui naîtra sera alors une copie génétiquement identique au parent qui aura, au départ, fourni une des cellules de son corps.

Le projet n'est-il pas réalisable puisque l'on a déjà réussi à cloner notamment une brebis (Dolly), une vache (Starbuck à Saint-Hyacinthe), une souris, un porc, un panda et deux races de singe? Il s'agit d'«une entreprise qui est irresponsable, s'insurge le docteur Raymond Lambert, professeur au département d'obstétrique et gynécologie de la faculté de médecine de l'Université Laval. C'est le mot qui s'impose même s'il est très fort . Toute la littérature sur le sujet indique que la naissance des clones s'accompagne d'une multitude de problèmes de santé: notamment en cours de grossesse et qui mènent à des avortements spontanés.»

Le chercheur québécois souligne clairement que les taux de succès chez l'animal sont extrêmement faibles, ne dépassant pas 3 %. «À la naissance, la survie des clones est précaire car les animaux sont trop gros ou trop petits. Ils souffrent souvent de déficiences immunitaires et ce sans compter les problèmes génétiques. Les anomalies chromosomiques en particulier dont sont atteints les primates.» Or, l'humain n'est-il pas un primate? «Dans le contexte du projet du Dr Antinori, cela suggère que l'entreprise sera plus difficile que ce qu'ils prévoient. Sur la base des résultats scientifiques obtenus à ce jour, l'entreprise est donc totalement irresponsable, renchérit Raymond Lambert.

Ses propos abondent dans le même sens que ceux du père de la brebis Dolly, Ian Wilmut, du Roslin Institute d'Edimbourg. «Le clonage est très inefficace chez toutes les espèces. Les fausses couches, les naissances prématurées et diverses malformations sont très courantes chez les animaux clonés, a déclaré le scientifique écossais. On devrait s'attendre aux mêmes échecs pour le clonage humain.»

Surtout que le Dr Antinori est probablement beaucoup moins rompu à la technique du clonage que Ian Wilmut et Lawrence Smith de Saint-Hyacinthe qui a cloné Starbuck. Selon Raymond Lambert, l'inconscience du comportement du Dr Antinori fait la preuve qu'il n'est pas au fait des dangers et de la littérature sur le clonage.

«Si ce chercheur réussissait avec des animaux de laboratoire et de la ferme à donner naissance à des clones exempts de problèmes de santé, nous pourrions alors nous poser la seconde grande question [avant de procéder à la «grande manipulation»]: est-ce éthiquement et socialement souhaitable?», enchaîne le professeur Lambert.

Édith Deleury, juriste à la faculté de droit de l'Université Laval, est inquiète et perplexe devant l'arrogance du Dr Antinori qui concrétisera son projet en dépit d'un vaste consensus d'ordre moral. Consensus qui est non seulement l'apanage de la convention européenne de bioéthique, qui considère le clonage comme un acte condamnable, mais une unanimité mondiale. «Ce défi de transgression, ce refus de s'assigner des limites est vraiment inquiétant», précise-t-elle.

«Il y a d'autres moyens de combattre l'infertilité sans créer des doubles, ajoute la juriste. À partir du moment où techniquement des choses apparaissent possibles, est-ce légitime de les faire? C'est là tout le questionnement qu'on doit se poser comme société.» Pourquoi ne serait-ce pas légitime? «Même si dans le désir d'avoir un enfant, il y a bien sûr l'idée de se prolonger. [Avec le clonage], cela devient du narcissisme.»

Le clonage est extrêmement réducteur pour la notion de personne, souligne Édith Deleury. «C'est une négation de la liberté de l'individu qui sera mis au monde. Une négation de l'altérité. Et à partir du moment où l'altérité ne se rapporte qu'à soi-même, il y a un problème social. Bien sûr, les clones seront des personnes à part entière mais une personne qui, dès le départ, aura une dignité et un sens propre qui ne lui seront pas reconnus.»

«C'est le fantasme de l'immortalité qui resurgit, fait remarquer Mme Deleury. Le refus de la condition humaine dont la mortalité en fait néanmoins la richesse...»

Avec l'AFP

 
   
 
 

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