ArticleDemers20IX2008
La naissance de l'nergie
atomique.
Notes d'un
Qubcois collaborateur de Joliot-Curie en 1939-40
Pierre Demers,
Professeur retrait,
EAPD Entreprise
autonome Pierre Demers
Traduction interdite
Texte
soumis pour le congrs du CTHS Comit des travaux historiques et scientifiques
Qubec du 2 au 6 juin 2008. http://www.cths.fr/top
remani depuis lors. 20IX2008
1938-1939.
Octobre-septembre.
L'anne 1938 tait charge de lourds prsages qui
allaient bientt se concrtiser en un horrible conflit universel. Mais j'avais
24 ans, tant totalement ignorant et indiffrent des questions politiques, et
mon rve se ralisait. Car j'obtenais enfin une (demi-)bourse du Secrtariat du
Gouvernement du Qubec. C'tait pour aller tudier en France l'cole normale
suprieure, grce au concours bienveillant de Lon Lortie, Ernest Gendreau,
Edmond Buron et de plusieurs autorits dont Jean Bruchsi au Qubec, Clestin
Bougl, Directeur de l'ENS et
Georges Bruhat, Directeur scientifique de l'ENS. Dbut novembre, j'arrivais en
France o Edmond Buron, archiviste canadien La Flche et Paris,
m'accueillait. Il habitait 52, rue de Maubeuge dans le 9e arrondissement.
J'tais en compagnie de Jacques Leduc, qui lui aussi allait tudier cette
mme cole en lettres. Lui et moi partagions une bourse du Qubec. Jacques
Leduc devait revenir le 12 juillet 1939, par le paquebot France, aprs une
brve hospitalisation l'Institut Pasteur, pour mourir dans sa famille d'une
maladie cardiaque qu'alors on ne savait pas gurir.
Ë l'ENS, plusieurs personnalits de la science franaise
s'affairaient nous instruire, mes camarades de promotion et moi. En chimie,
Paul Pascal le minraliste et Georges Dupont l'organicien, auteurs et
rdacteurs d'encyclopdies, l'un de la chimie minrale, l'autre de la chimie
organique; en physique Georges Bruhat auteur sous sa seule signature d'un cours
de physique en une demi-douzaine de tomes, Eugne Bloch le spectroscopiste,
affectueusement surnomm le grand, assist de son frre Lon, de moindre taille
et aussi bien surnomm le petit. Pierre Auger. Louis de Broglie qui nous
parlait et nous faisait parler de physique atomique et de mcanique
ondulatoire. Par-dessus le march, j'essayai d'couter les cours de Borel en
Sorbonne sur les probabilits.
FigN1.jpeg
Fig. 1. Le Trocadro pavois,
nuit du 14 juillet 1939. Le vent agite les banderolles et les feuilles des
arbres (des platanes), les ttes de la foule dessinent leurs silhouettes dans
le bas.
1939. Le 14 juillet. Plusieurs amis et moi, nous
commenons une vire en longeant le Trocadro patriotiquement pavois, o le
Prsident Lebrun vient de livrer un discours, puis, ports par une foule
compacte, nous nous dirigeons vers la butte Montmartre, l, nous entrons au
clbre Lapin agile, cabaret artistique o on nous joue de la vielle et on nous
sert des cerises l'eau-de-vie. Nous faisons un passage court au restaurant
La Crmaillre. La fte nocturne s'achve pour notre groupe sur une gratine
dans un restaurant aveyronnais des Halles, Le Pre Tranquille. Le groupe
initial s'tait rduit graduellement et ne contenant plus, la dernire tape,
que Simone Meillon, Germaine de Pocas, un tudiant indien et moi. Et nous
rentrons par le 1er mtro sous l'aube naissante. (fig. 1) 1
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1 Le Cabaret artistique Au Lapin agile, 22, rue des Saules,
75018 Paris France. http://www.au-lapin-agile.com/histo2.htm
Le concours d'agrgation des sciences physiques tant
termin pour moi (voyez Annexe 1), je partais sac au dos, log dans les
Auberges de jeunesse, faire la route des crtes en Alsace au mois d'aot, de la
roseraie de Saverne au monastre de Sainte-Odile, puis l'Auberge de Xonrupt
sur le Lac Blanc, au Champ de Feu au Hohwald et au Ballon d'Alsace. C'est ainsi
que je parcourus 40 km en une dizaine d'heures, la distance du marathon
olympique sinon sa vitesse, pour arriver l'auberge de Xonrupt la nuit
tombe. Alfred Kastler a vu le jour non loin du Ballon d'Alsace, Guebwiller
(3V1902-Bandol 7I1984). Il tait prsident de mon jury d'agrgation. Il
dcouvrit en 1959 le 1er procd de pompage optique, anctre du laser aux
innombrables applications. Il a obtenu le prix Nobel de physique en 1966. Il a
t plus tard professeur invit aux Universits de Montral et de Trois-Rivires.
Il fut un collaborateur de Science et Francophonie. Il fut membre de la LISULF
(section franaise ANSULF), au sein de laquelle il prcha le bilinguisme
franco-allemand : Ç Zweisprachsprachig ist unser zukunft. È (Notre futur est bilingue) 2.
Ne pas confondre avec le bilinguisme franco-anglais..
Au sujet du Lac Blanc, j'ai recueilli deux anecdotes ou
lgendes, l'une ancienne, l'autre moderne. L'ancienne se rapporte
Charlemagne, qui s'tait pris de ce lieu; au point de prenniser son
attachement par un procd inusit : il y jeta un anneau d'or, que personne n'a
retrouv depuis lors. L'autre anecdote, et je devrais dire plutt information,
est que ce lac sert de rservoir tampon pour l'hydrolectricit d'Alsace. Dans
les priodes creuses, un barrage sur le Rhin non loin et plus bas y pompe de
l'eau, qu'on laisse ensuite couler pour ajouter la production d'lectricit
aux priodes de grande demande. C'est ce qu'on appelle une STEP Station de
transfert d'nergie par pompage, aux consquences cologiques surveilles.
Ë la plage du Lac Blanc, j'ai remarqu une affiche
inoubliable parce que rdige dans un bien curieux langage : ÇEs ist strengtens
untersachs ohne Badenkostume sich zu badierenÈ. tait-ce en un dialecte
almanique?
Je revins plus tard en Alsace partir du colloque sur
l'ionographie organis en 1957 par Pierre Cer son lab0ratoire de Cronenbourg
et en 1970-71 l'occasion de mon anne sabbatique passe comme Gast-professor
l'universit Goethe de Francfort-sur-le-Main auprs du Pof. Erwin Schopper.
Le laboratoire de Cronenbourg a t cr par le CNRS sur la recommandation
insistante de Mlle Marguerite Perey (1909-1975) la suite de la dcouverte par
cette dernire en 1938 de l'lment Francium 87, un alcalin radioactif situ
entre le Radon 86 et le Radium 88. L'exemple de Mlle Perey m'a guid dans le
choix d'un nom pour baptiser, en 1995, l'lment spculatif 118 qui serait le
gaz rare terminant la dernire priode connue : j'ai choisi Qubcium. La
marraine fut Huguette Proulx-Arsenault. (fig. 2) 3, 4, 5, 6.
FigN2.jpeg
Fig. 2. Marguerite Perey
1909-1975.
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2 Guebwiller, Sur Guebwiller et
Alfred Kastler, http://www.ville-guebwiller.fr/public/alfred_kastler.html
3 mishal, Sur Marguerite Perey. http://misha1.u-strasbg.fr/AMUSS/nouveaute3.htm
4 P. Demers, Ionographie Les mulsions nuclaires, Montral, Presses universitaires
de Montral
ditions
PUM, 1962 (15,2 cmX23,2 cm), 852 pp.
5 P. Demers 2008, Site sur le Systme du Qubcium. http://www.er.uqam.ca/nobel/c3410/quebecium.html
6 P. Demers, Systme du Qubcium. La nouvelle classification des
lments, Presses
universitaires de Montral
ditions PUM, 2004. Livre papier et disque optique ISBN 2-9802454-7-X. Lancement
le samedi 24 juillet 2004, 17h au sige social.
De retour Paris, je repartais trouver mon camarade de
l'ENS Jean Schiltz Charleville dans les Ardennes, dans l'intention d'une
nouvelle randonne qui devait commencer par le monastre des Trappistes d'Orval
en Belgique, affili celui d'Oka prs de Montral, o l'on fabriquait le
rput fromage d'Oka. Mais les rumeurs d'un conflit imminent et de mobilisation
gnrale couprent court ce projet et je revins Paris.
1939-1940.
Septembre mai.
La drle de guerre tait dclare, avec les apparences
d'un temps de paix. Mon agrg-prparateur de physique Pierre Grivet, futur
Acadmicien, me conseilla : Ç Pour toi, c'est le laboratoire de Louis
Leprince-Ringuet l'cole Polytechnique sur le rayonnement cosmique ou bien
celui de Frdric Joliot-Curie au Collge de France sur la physique
nuclaire È. Je me sentais plus en pays de connaissance en physique
nuclaire cause de la tradition de Rayons-X et de radioactivit que
reprsentait pour moi mon professeur Ernest Gendreau de l'Universit de
Montral, et j'optai pour le laboratoire Joliot.
J'ai compris plus tard que je sortais d'une marmite
dcouvertes, pour rentrer dans une autre. Le laboratoire de Joliot tait la
nouvelle marmite. Je veux parler de celle que je quittais l'ENS. o Thrse
Mayer-Grivet, pouse de Pierre Grivet venait de raliser avec Pierre Auger et
Roland Maze la dcouverte des grandes gerbes cosmiques, encore inexpliques de
nos jours, qui nous arrivent en permanence de l'espace et qui ont suscit
rcemment l'installation de dispositifs de dtection de grande envergure en
Argentine, en Afrique etc. Pierre Auger tait l'un de mes professeurs l'ENS.
Certaines de leurs expriences furent faites au printemps 1939 sur le terrain
de l'ENS, selon ce que je sais, sur le toit que j'ai photographi fin automne
1938. (fig. 3)
7.
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7 J.-F.
Picard et E. Pradoura, le 23 avril 1986., Entretien avec Pierre Auger.
http://picardp1.ivry.cnrs.fr/
FigN3.jpeg
Fig. 3. Automne 1938, photo du
toit de l'ENS, surplombant la rue Lhomond. Germaine de Jocas cachant en partie
le dme du Panthon et Juliette Chabot, de la Bibliothque municipale de
Montral. Ë droite la tour Clovis faisant partie du Lyce Henri IV. Sur ce toit
eurent lieu les premires observations des grandes gerbes atmosphriques par
Pierre Auger et ses collaborateurs au dbut de l'anne 1938. Photo Pierre
Demers
D'ailleurs, la marmite 1939 tendait son emprise sur les
alentours de l'ENS puisque la dcouverte du Francium fut faite par Mlle Perey
l'Institut du Radium situ dans le mme quartier que l'ENS. Elle fut annonce
aux Comptes rendus de l'Acadmie des sciences en janvier 1939.
En septembre 1939, je n'tais plus log l'ENS, rue
d'Ulm, mais plutt la Cit universitaire de Paris, boulevard Jourdan, dans le
14e. Tantt ce fut la Maison des tudiants canadiens, directeur Firmin Roz et
tantt aux Provinces de France. Je circulais bicyclette, sur une Alcyon
blanche.
Mon 1er contact avec le laboratoire Joliot au Collge de
France rue des coles dans le 5e, me mit en prsence de Hans von Halban, qui me
conseilla des lectures : des Actualits Hermann, Les Atomes de Jean Perrin et
Le Hasard d'mile Borel. Je retrouvai l brivement (Franoise) Chaminade une
camarade de l'ENS de Cachan je crois. On m'apprit qu'il ne fallait rien dire
quiconque de mes travaux. Ce fut mon 1er contact avec les politiques du secret,
tellement contraires l'esprit scientifique et au culte de la vrit, qui
dominent encore dans le monde 70 ans plus tard.
La plus grande partie de mon temps se passait au
Laboratoire de synthse atomique Ivry-sur-Seine. Je fis des mesures de
sections efficaces, ce qui est une manire de dire : de coefficients
d'interaction, capture et diffusion, des neutrons dans diffrentes matires :
carbone, eau lourde, aluminium etc. Neutrons de diffrentes nergies, dfinies
par les dtecteurs utiliss : dysprosium, indium, or que les neutrons rendaient
radioactifs. Dysprosium mesurait sensiblement les neutrons thermiques, au
voisinage de 0,016 .v., indium, ceux de 0,6 .v., or ceux de 2,7 .v.. Je
mesurais la radioactivit des dtecteurs au moyen de compteurs de
Geiger-Mller. Geiger veut dire violoniste et Mller, meunier. Les physiciens
allemands Geiger et Muller ont-ils frquent les laboratoires de Paris? -
Quelques annes plus tard, la paix tant revenue, deux pres jsuites de langue
franaise firent des confrences Montral. L'un s'appelait Geiger et l'autre,
Mller.
J'ai appris depuis ce temps un peu de ce qui s'tait
pass avant mon arrive, entre autres le dpt d'une demande de brevet au nom
du CNRS le 4 mai 1939, intitul : "Perfectionnements aux charges
explosives" No 971.324. Y-est dcrite la possibilit d'une raction en
chane explosive de l'uranium, propage par les neutrons, librs en nombres
suprieurs l'unit dans chaque rupture des noyaux. Cette demande fait
rfrence une prcdente, dpose le 1er mai 1939, intitule :
"Dispositif de production d'nergie". (fig. 4).
FigN4.jpeg
Fig. 4. Demande de brevet au nom
du CNRS le 4 mai 1939, intitul : "Perfectionnements aux charges
explosives" No 971.324. Y est dcrite la possibilit d'une raction en
chane explosive de l'uranium, propage par les neutrons, librs en nombres
suprieurs l'unit dans chaque rupture des noyaux. Cette demande fait
rfrence une prcdente, dpose le 1er mai 1939, intitule :
"Dispositif de production d'nergie".
Personnalits.
J'essaie d'numrer les personnalits rencontres dans
ces laboratoires.
Frdric Joliot-Curie. Une fois, au cours d'un repas, il
sortit de sa poche un papier et me demanda de le lire : c'tait le clbre ÒSiÒ
de Rudyard Kipling, qui se termine ainsi : Ò alors, tu seras un homme, mon
filsÒ. Il tait un homme affable et dtermin. Une autre fois, il nous raconta
que les changes ferroviaires entre France et Allemagne se ralisaient fort
bien, travers la Principaut du Luxembourg. Une autre fois encore, il nous
montra un canif ralis dans un alliage nouveau, vermeil, dur et luisant;
tait-ce un bronze d'aluminium? Et j'en ai oubli. Je crois qu'il nous
apportait ainsi les chos des nombreux comits dont il faisait partie.
Son pouse Irne Curie, peu bavarde.
Hans von Halban, d'origine suisse et autrichienne;
l'automne 1939, il m'invita une fois chez lui avec son pouse originaire des
Pays-Bas, pays des tulipes , et j'arrivai avec dans les bras un bouquet de
tulipes, videmment tout fait hors saison. Le bouquet fut fort apprci. Je
me rendis son invitation en compagnie de Kowarski.
Lew Kowarski, originaire de Dantzig, donc la fois
russe, polonais et allemand. Bon gant, cultiv, avec qui je sympathisais
particulirement.
Paul Langevin, professeur l'cole de chimie et de
physique de la Ville de Paris rue Lhomond, qui fit un sminaire; cette fois, il
ne dploya pas l'loquence persuasive, qu'il rservait pour les runions de son
Union rationaliste.
Charles-Philippe Leblond et son pouse Gertrude, qui
exprimentaient dj avec l'iode radioactif comme traceur biologique sur des
animaux de laboratoire. Pour eux, la vie tait une course perptuelle cause
de la priode trs courte du seul isotope radioactif de l'iode alors
disponible. Plus tard, nous nous
retrouvmes Montral.
Je les rencontrai pour fter l'Action de grces 1939.
C'tait chez les Bonnerot, 9, rue Thnard, dans le 5e, o vivait Sherwood K.
Haynes et sur l'invitation de ce dernier. Cette fte est clbre en Amrique
du Nord deux dates diffrentes : en octobre pour la canadienne et en novembre
pour l'tats-unienne. Or c'tait le 30 novembre. J'en ai conserv le menu
manuscrit de la main de Haynes, autographi par les convives sauf moi-mme.
Haynes a commenc de faire autographier son exemplaire du menu, j'ai fait comme
lui. On mangea de la dinde avec des canneberges; des bches flambaient dans la
chemine. (fig. 5).
FigN5.jpeg, FigN5N.jpeg
Fig.5 . On reconnat les
autographes de F. Joliot, Irne Joliot-Curie, Hlne J. Bonnerot,. Jean
Bonnerot, Alain Bonnerot, Alex Bonnerot, C. P. Leblond, Gertrude Leblond, Marie
Finklestein de Suisse, Sherwood K. Haynes, (Pierre assistait, de la main de mon
pre Alfred).
Avec l'Amricain Sherwood K. Haynes, j'allai manger au
restaurant Roger La Grenouille. Plus tard, il a fait carrire dans
l'enseignement et il fut cr un prix qui porte son nom l'Universit (Ann
Arbor) du Michigan 8.
Paul Savel, futur Directeur du laboratoire d'Ivry.
L'Espagnol Mans.
8 Le Restaurant Roger La Grenouille. http://www.bestrestaurantsparis.com/restaurant-paris/detail/roger-la-grenouille.html
Le sympathique Italien Bruno Pontecorvo, ancien
collaborateur Rome de Fermi et
de Franco Rasetti, ce dernier qui devint professeur l'Universit Laval
Qubec et y fit des expriences sur la diffraction anisotrope des neutrons
thermiques par les cristaux de calcite, dmontrant que les neutrons possdent
la dualit onde-corpuscule tout autant que les lectrons et les photons.
Pontecorvo, porteur d'un passeport canadien, passa aux Sovitiques en 1950. Au
Laboratoire d'Ivry, il exprimenta avec le grand gnrateur lectrostatique
d'impulsions, dont les dcharges faisaient un vacarme de tonnerre dans un hall
tout de tle ferm. Il me parlait de sa jeunesse de saltimbanque : il circulait
bicyclette install reculons. - Au carnet mondain du laboratoire : j'ai eu
connaissance de son mariage avec une sudoise, le 5 janvier 1940. - Enrico
Persico, qui fut en Italie professeur de plusieurs contemporains d'Enrico
Fermi, fut plus tard lui aussi professeur l'Universit Laval aprs Rasetti.
Le technicien Delattre, dont le pre tait ngociant en
farine;
Le concierge Calot et son pouse, qui nous servaient des
repas du midi dlicieux. C'est ainsi que je gotai pour la 1re fois du cheval;
Pierre Se, chimiste, qui avait son laboratoire au
Collge de France, avec lequel je me sentais en amiti, qui crait ce moment
la revue Atomes, dirige plus tard par Cherqui, perptue sous le nom de La
Recherche. Il a pu connatre le chimiste (Paul) de Passilli, de l'cole
polytechnique de Montral, qui, vers 1935, a ralis son doctorat concernant le
phosphore au Collge de France, dans le laboratoire de Charles Moureu.
Les Portugais da Silva de l'Universit de Combra, auquel
je rendis visite chez lui en juin 1940; et Gibert, de l'Universit de Lisbonne,
qui chercha raliser une industrie nuclaire plus tard dans son pays;
Le Russe ou Polonais Zlotowsky.
Je crois avoir vu l le Franais Serge Gorodetzky de
l'Institut du Radium, que j'ai retrouv plus tard Strasbourg.
La Japonaise Yuasa qui tait une chrtienne; elle a connu
la musicienne Maryvonne Kendergi, de l'Universit de Montral, avec qui je
converse parfois, mais qui n'a gure de souvenirs d'elle. Yuasa et moi, nous
fmes quelques mesures sur les neutrons ensemble. J'ai not son sujet :
"manque un peu d'imagination".
Le Chinois Tsien-San-Tsiang avec son pouse Hoh-Zah-Wei
qui devaient faire plus tard, comme moi, des travaux par ionographie sur la
fission. Tsien dirigea plus tard l'nergie atomique chinoise. Je crois que
c'est lui qui, sous le nom de Chien, visita le CERN plus tard 9.
J'ai eu plus tard un lien avec l'nergie atomique du
Pakistan, pays limitrophe de la Chine, puisque mon ancien lve au doctorat,
Ishfaq Ahmad y est devenu directeur scientifique d'nergie atomique Pakistan
Islamabad et maintenant la retraite.
De toute cette population scientifique du laboratoire
Joliot, il ne resterait en France qu'un survivant, le technicien Georges
Ligonnire, qui tait attach au Collge de France, maintenant nonagnaire 36.
La chambre noire,
l'criteau.
Il y avait, dans le laboratoire
d'Ivry, une chambre noire donnant sur la pice o je ralisai la plupart de mes
expriences sur les neutrons. Joliot et Halban, chacun de son ct, me dirent
plusieurs fois : "Demers, l est votre avenir, vous tes chimiste, vous
pratiquerez la mthode photographique". Ë l'poque, la mthode
photographique ne me disait rien du tout. J'ignorais que l'Autrichienne
Marietta Blau en avait illustr les premiers pas au Laboratoire de Marie Curie
quelques annes auparavant, en dcouvrant entre autres les toiles cosmiques
visibles sous le microscope. J'ignorais encore plus, si je peux dire, que
j'allais consacrer la mthode photographique 30 annes de ma vie et crire un
livre son sujet : Ionographie Les mulsions photographiques nuclaires. (fig.
6) 4.
9 "Tsien San-Tsiang, l'un des patrons de la bombe
chinoise", PARIS MATCH No 951 du 01.07.67 http://www.muhlemann.ch/paris_match_1967_68.htm
FigN6.jpeg
Fig. 6. Ivry-sur-Seine.
Laboratoire de synthse atomique. Photo merci Ginette Gablot.
Autre anticipation ou orientation dans ma carrire, que
je me plais apercevoir dans le stage que je dcris. Le nom mme sur
l'criteau qui domine l'entre du laboratoire d'Ivry est troublant. Que veut
dire en effet, synthse atomique? Comment peut-on prtendre mettre ensemble
(c'est bien le sens d'une synthse, de sun et tithmi, ensemble et mettre) une
chose qui n'a pas de partie (a pour alpha privatif et tomos partie)? Atome,
primitivement, voulait dire inscable. Kowarski laborait volontiers sur cette antinomie,
pour ne pas dire cette absurdit. Atome, dans le langage convenu, s'applique
la constitution de la matire en noyaux et lectrons les entourant, qu'on peut
dissocier ou modifier au moyen d'une nergie de quelques lectrons-volts par
particule, qui peuvent s'associer pour donner des molcules dont celles des
tres vivants. La rdaction de l'criteau s'appliquait aux expriences comme
celle de Leblond, qui modifiait les noyaux des atomes d'iode pour les rendre
radioactifs.et en former ainsi des traceurs ou indicateurs radioactifs.
Prise dans son sens propre, l'intention exprime par
l'criteau couvre toute la physique de l'atome et de ses constituants, donc la
physique atomique et subatomique. Or la mthode photographique que j'ai
longuement pratique partie de 1945 s'appliquait la physique subatomique,
tandis que le systme du qubcium que je dveloppe depuis 1995 s'applique a
physique atomique. J'aperois dans cet criteau une valeur anticipatrice pour
toute ma carrire 4, 5, 6.
Vacances 1940.
Vacances de neige. Mois de janvier, je suis aux sports
dÕhiver l'Alpe d'Huez via Grenoble. J'y rencontre Marie-Paule Colllotte. -
Vacances de Pques cyclistes. Les chteaux de la Loire en compagnie du
philosophe Andr Dagenais. Dans les htels, il n'y a pas de place libre parce
que toutes les chambres sont rserves pour le repli escompt de la Banque de
France, mais comme aucune des chambres n'est effectivement occupe, on nous
accueille gratis!
Le Grand Drangement sur
le sol de France.
Et ce que l'avenir avait en rserve finit par clater. En
mai, c'tait l'incroyable perce des Allemands Sedan et la droute de l'arme
franaise dborde et normment gne dans ses dplacements vers le front, les
civils Franais ayant plus ou moins l'ordre de fuir vers le sud. En compagnie
d'Andr Dagenais, je vais une soire extraordinaire de l'Opra Garnier
consacre Charles Pguy, crivain catholique et patriotique avec les
socitaires de la Comdie Francaise dont Berthe Bovy. Ce fut une rvlation
mouvante pour moi. "Le petit enfant qui s'endort en disant sa
prire", "Paris double vaisseau de charge", "Heureux ceux
qui sont morts". Aprs la reprsentation, nous nous sommes attards au Bar
laitier dont la faade donnait sur le ct ouest de l'Opra, rue Auber ou rue
Scribe. J'tais trs impressionn. Dagenais ne l'tait pas autant que moi. Dans
un clair de vrit, je venais d'apercevoir un peu du monde de la pit, de la
posie et de la rflexion; pour Dagenais, tant philosophe, ce monde tait
familier.
Andr
Dagenais m'a rappel qu' la mme poque, nous sommes alls ensemble voir
l'opra de Mozart La flte enchante Die Zauberfl¿te. Les Franais ne pchaient
pas par chauvinisme!
Presque toutes les nuits, alerte des sirnes et course
vers les abris dans les jardins de la Cit universitaires. Et finalement c'est
le Grand Drangement du XXe sicle, un peu comme le (relativement Petit) Grand
Drangement des Acadiens au XVIIIe, en 1755, prcdant la prise de Qubec en
1760. Dclenchs par des Anglo-Saxons dans les deux cas. Le plus ancien
concerna une population francophone modeste (environ 15000) mais une immensit
territoriale qu'il fallait rserver l'immigration anglophone; le plus rcent
toucha des millions de Franais et facilita l'occupation de l'Hexagone par les
Allemands 10.
Les Parisiens sont masss aux
abords de la gare Montparnasse. Je laisse tous mes bagages aux soins
d'Aleksander Aspel, Esthonien donc neutre. Je ne sais pas ce qu'ils sont
devenus. Et je prends la route sur ma bicyclette avec mon sac au dos. Andr
Dagenais tait parti Rennes, d'o il gagna l'Angleterre et il fut bientt
rapatri au Qubec. Voici le calendrier de mon odysse. (fig. 7).
10 La dportation des Acadiens (Le Grand
Drangement). http://fr.wikipedia.org/wiki/D%25C3%25A9portation_des_Acadiens
FigN7.jpeg
Fig. 7. Calendrier 1940. 10 mai,
perce des Allemands Sedan. Le 9 juin, mon dpart de Paris. Le 14 juin,
entre des Allemands Paris. Le 22 juin, Armistice. Le 27 juillet, mon
embarquement Lisbonne. Le 10 ou le 11 aot, mon arrive Montral.
Mon retour, l'odysse.
Le 1re tape est facile, le dimanche 9 juin. le Nord-Sud
me dpose son terminus de Saint-Rmy-les-Chevreuse en compagnie de l'tudiant
danois Perry Scheller. Nos bicyclettes nous accompagnent.
Nous pdalons vers le sud. Bientt nous nous sparons,
Scheller va vers Rennes et l'Atlantique afin de rejoindre l'Angleterre et moi
j'entreprends d'atteindre le Portugal o m'attirait Salazar alors dou de bonne
rputation. Je poursuis vers Chartres, dormant dans les abris ou en plein air
et j'arrive Angoulme o je perds ma bicyclette. Je fis escale au chteau
d'Azay-le-Rideau o le Directeur Chtelet me dlivra un certificat de mon
agrgation des sciences physiques. Joliot m'avait donn des instructions
crites de rallier son laboratoire repli Clermont-Ferrand mais je passai
outre. La SNCF me dposa Bordeaux et j'tais Biarritz le jour de
l'Armistice le samedi 22 juin 1940..
La potesse Simone Routhier tait, comme Edmond Buron,
fonctionnaire du Canada en France. Elle a racont son propre dplacement, entre
le 10 mai et le 17 juin, dans un livre : "Adieu Paris". Elle
abandonna son appartement tout meubl Paris. (fig. 8).
FigN8.jpeg
Fig.8 . "Adieu Paris".
Simone Routhier. 10 mai - 17 juin 1940.
Edmond Buron ne voulait pas abandonner ses enfants
tablis en France et je sais qu'il a vcu aux environs de Bordeaux. De lui j'ai
connu son frre jsuite, prof. de chimie et son neveu cinaste Pierre Buron qui
ralisa "Bombe A Montral", o j'apparais 11.
Au sujet de ce film, Bertrand Goldschmidt m'a confi son
apprciation : "Ni trs bon ni trs mauvais." C'tait au cours d'une
rencontre, vers 1987, au Palais de la dcouverte, o il racontait, avec
plusieurs autres, l'historique de
l'nergie atomique en France.
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11 P. Buron, qui ralisa "Bombe A
Montral", o j'apparais. http://www.realisateur.qc.net/pageBuron.htm
Aprs un mois d'attente aux agrables plages portugaises
d'Estoril et Cascais, o je me liai d'amiti avec l'artiste peintre britannique
Charles-Timothy Osborne Hill, je rentrais chez mes parents Montral au mois
d'aot, bord du vaisseau portugais Luso, ancien allemand Germanicus. Je
m'embarquai le samedi 27 juillet 1940. - Camillien Houde avait t mis en
prison pour refus de collaborer la mobilisation dcrte par Ottawa. Je
dbarquai au Port de Montral le samedi 10 aot 1940 ou le lendemain.
...
1942-1946. Le
Laboratoire de Montral.
Novembre-dcembre 1942, je reois un appel mystrieux :
Hans von Halban tait Montral et voulait me rencontrer. Ce qui eut lieu au
cours d'un repas auquel il m'invita, c'tait dans l'Htel Mont-Royal, sur la
rue Sherbrooke, disparu comme tel depuis ce temps. Il m'offrait de continuer
mes recherches entreprises avec lui et Joliot. Mon employeur industriel consent
me librer et je deviens fonctionnaire du gouvernement d'Ottawa dans une
agence ultra-secrte qui sera connue dans l'histoire comme "Le projet
atomique du Canada" ou "Le Laboratoire de Montral". Elle est
devenue une corporation de la Couronne fonde en 1952 12, 13, 14, 15.
En attendant la disponibilit des locaux lous dans
l'Universit de Montral la Cte-des-Neiges encore en construction, l'quipe
se runissait ds janvier 1943 au 3470, rue Simpson, dans une grande maison
lgue l'Universit McGill, longe par un chemin pitonnier continuant la rue
Summerhill. Je rencontrai l 2 Franais que je connaissais :
Pierre Auger, qui avait t mon professeur l'ENS, qui
devenait le Directeur de la physique;
Hans von Halban, Directeur du Laboratoire;
(3e Franais, Lew Kowarski, devait venir plus tard);
et 2 que je ne connaissais pas encore, donc 5 au total:
Jules Guron, chimiste de Strasbourg;
Bertrand Goldschmidt, chimiste, qui fut le dernier lve
de Marie Curie l'Institut du Radium de Paris; il avait ses entres dans les
laboratoires amricains; sa mre vivait New-York.
Bruno Pontecorvo rejoignit l'quipe bientt, aprs un
stage dans l'industrie ptrolire aux .-U.
Il y avait aussi Pranz Paneth et son fils Fritz Paneth,
d'Autriche. - Ces internationaux savaient le franais et le parlaient par
choix.
Une quinzaine de physiciens, mathmaticiens, chimistes et
ingnieurs s'ajoutaient cette liste, venus du Royaume-Uni. Entre autres Alan
Nunn May qui fut mon chef immdiat, lÕlectronicien Freundich. Plusieurs
avaient particip la cration du radar qui fut l'arme secrte extrmement
valable prvenant les Britanniques des bombardements ariens provenant du
continent. D'autres collgues avaient diverses origines, par exemple
Watson-Munro de Nouvelle-Zlande. Ce dernier, avec Lew Kowarski, allait bientt
raliser ce bijou de ZEEP, pile exprimentale d'nergie zro, base d'uranium
canadien et d'eau lourde canadienne, qui a servi mes expriences.
------------------
12 EACL Corporation du Gouvernement du Canada fonde en
1952. http://en.wikipedia.org/wiki/Atomic_Energy_of_Canada_Limited,
http://www.aecl.ca/site4.aspx
13 EACL : 1952 Feb 14 , Atomic Energy of Canada Limited
(AECL) was incorporated as a federal crown corporation, under Part 1 of the
Companies Act 1934, http://www.cns-snc.ca/history/history.html
14 G. C. Laurence, Le dbut de la recherche nuclaire au
Canada, EACL Recherche, 1991. Contient une photo de l'quipe ses dbuts, http://www.cns-snc.ca/history/early_years/earlyyears_fr.html
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15 CIL DIL Mon employeur industriel 1940-1942 tait: CIL
DIL, Laboratoire R&D Beloeil-McMasterville o j'tais
spectroscopiste.
Le ROC (reste du Canada) tait reprsent entre autres
par :
George C. Laurence, descendant du clbre gnral qui fit
la dportation des Acadiens au 18e (le Grand drangement), patriote canadien et
sorte d'minence grise du projet, avec le ministre C. D. Howe.;
Bernice W. Sargent, ancien collaborateur de Rutherford et
dtach de l'Universit Queen's Kingston, Ontario. Laurence et Sargent
passrent prs de raliser avant 1943 la 1re pile fonctionnelle, avant Fermi,
par un empilement de graphite et d'oxyde d'uranium. Mais leur graphite
contenait une quantit excessive de l'lment bore, et autres poisons pour la
raction des neutrons sur l'uranium.
George Volkoff, de l'Universit de Colombie-Brtannique.
Il y eut 4 Qubcois scientifiques francophones qui avons
fait ensuite carrire dans l'enseignement : Paul Lorrain dcd en 2006.
Jacques Hbert (le physicien, pas le snateur dcd en
2008), qui habite Gatineau;
Colette Fortier, qui habite Saint-Sauveur-des-Monts;
moi-mme Pierre Demers qui survivons. Je dois ajouter le
chimiste Adrien Cambron du CNRech. Ottawa et l'ingnieur Desbarats de Trois-Rivires
qui dirigea des travaux de gnie au site de Chalk River. Je converse parfois
avec la veuve d'Adrien Cambron qui s'appelle Maude-Esther-Pierrette Bariteau et
avec son fils Pierre Cambron.
La composition du laboratoire en 1943 (fig. 9) 14.
FigN9.jpeg
Fig. 9. Quelques membres du
laboratoire 1943. Debout: A.M. Munn (C), B.L. Goldschmidt, J.W. Ozeroff (C),
B.W. Sargent (C), G.A. Graham (C), J. Guron, H.F. Freundlich, H.H. Halban,
R.E. Newell, F.R. Jackson, J.D. Cockroft (en visite au Laboratoire), P. Auger,
S.G. Bauer, N.Q. Laurence, A. Nunn May. Assis: W.J. Knowles (C), P. Demers (C),
J.R. Leicester, H. Seligman, E.D. Courant, E.P. Hincks (C), F.W. Fenning, G.C.
Laurence (C), B. Pontecorvo, G.M. Volkoff (C), A. Weinberg (Agent de Liaison
des USA), G. Placzek.
Une grande nouvelle nous fut rapidement communique. En
langage code : ÇÉle navigateur italien vient dÕatterrir dans le nouveau monde
È. (Sans doute traduit de l'anglais). Cd : Fermi a russi dans son entreprise.
Ou encore : "Une pile graphite - uranium a effectivement diverg. C'tait
sous les gradins du stade de football de l'Universit de Chicago, le 2 dcembre
1942.
Je poursuivis mes recherches sur les neutrons entreprises
au Laboratoire de synthse atomique et sur d'autres sujets, entre autres les
fragments de fission et les dtecteurs ionographiques et je me dplaai avec le
laboratoire de Montral Chalk River et Deep River, sur la Rivire des
Outaouais. Ces appellations remontent Champlain qui remonta cette rivire
jusquÕ des lieux quÕil nomma lÕun Rivire la Craie, et l se trouve le
laboratoire, et lÕautre Rivire Creuse, et l se trouve le village atomique.
Je quittai le village atomique dans la soire du 31
dcembre 1946, accompagn de Paulette Loranger, pour rentrer Montral. Et je
pris un poste l'Universit de Montral, dans le Dpartement de physique
dirig par Marcel Rouault, ancien lve de l'ENS lui aussi, qui entretemps
avait remplac Ernest Gendreau.
Et voil comment s'est termine, sept ans plus tard, ma
participation l'aventure atomique proprement dite, commence dans le
Laboratoire Joliot en septembre 1939.
...
2008
Il resterait exposer les consquences politiques pour
le Qubec et pour la langue franaise de ces pisodes historiques dont j'ai t
un tmoin privilgi et un trs modeste acteur. Voici un essai. Pour ce qui
touche la politique de la France, on trouve plusieurs textes historiques sur
internet, entre autres celui de Guron sur Kowarski en 1980 16.
Pour ce qui touche le Qubec et la langue franaise, je
n'ai trouv aucune rfrence part mes propres travaux. Les historiens et les
scientifiques semblent s'tre donn la consigne du mutisme, sinon de
l'indiffrence. Terrain min, se disent-ils? Trop difficile comprendre? Bote
de Pandore, dont l'ouverture rvlerait des dsagrments? Et puis, il y a tant
dÕautres sujets plus pressants.
Je rappelle mon expos dans Science et Francophonie en
1990 17, 18, 19, 20.
J'en mets en vidence la conclusion :
Ç Cette dichotomie - cette dcadence, commena de
s'installer cause des concessions la langue anglaise que 2 Franais,
naturaliss depuis peu, chargs des dcouvertes de Joliot, acceptrent et
choisirent de faire, pour poursuivre efficacement leur travail en Angleterre
puis au Qubec. Arrivant en Angleterre, ils se mirent en relation avec les
Anglais, non avec la France Libre.
Conclusion.
Si De Gaulle avait su, s'il avait t inform ds le
dbut, cette dichotomie entre France et langue franaise se serait-elle
installe, avec les rsultats catastrophiques que l'on voit aujourd'hui?È.
Un autre dsastre pour
le Qubec et la langue franaise.
Dsastre, catastrophe, malheurs, occasions rates; je me
retiens de parler de cataclysme. Des dinosaures on ne retrouve que des
ossements, de la langue franaise en Amrique, du peuplement par les Franais
du Qubec et ailleurs, on trouve tout de mme une vitalit persistante et qui
nÕa pas cess de crotre depuis plus de 400 ans malgr tous obstacles
politiques.
Selon mon apprciation donc,
l'aventure atomique fut une autre occasion rate, cette fois-ci bien leur
insu, pour les Qubcois. Que se serait-il pass si les politiciens qubcois
avaient eu leur mot dire dans lÕentreprise atomique canadienne ses dbuts?
Ils auraient pu lÕorienter selon les intrts du Qubec et, ajoutons-le, du
reste du monde. LÕhypothse est parfaitement utopique parce que les puissances
anglophones qui contrlent le Canada donc le Qubec, nÕont assurment pas song
un seul instant aux intrts du Qubec comme tel. Et je voudrais paraphraser
cette phrase du quotidien de Paris LÕHumanit : Ç Dans un monde idal
lÕHumanit nÕexisterait pas È. Il faut bien dire que lÔhistoire des
Qubcois et autres francophones dÕAmrique depuis la conqute, est une suite
de dsastres et catastrophes. Mais voyons.
16 Guron sur Kowarski en 1980, Lew Kowarski. et le
dveloppement de l'nergie nuclaire. Jules Guron [CERN, Organisation
europenne pour la recherche nuclaire, mai 1980], http://www.cns-snc.ca/history/pioneers/kowarski/kowarski.pdf
17 P. Demers, Si de Gaulle lÕavait su. (Joliot, lÕatome et
la Francophonie), Science et Francophonie, 1990, t. 29, p. 3-16, INSN.0825.9879
18 P. Demers, 1990, Si de Gaulle lÕavait su. (Joliot,
lÕatome et la Francophonie, suite), Science et Francophonie, 1990, t. 30, p. 7-16, 1990,
INSN.0825.9879
19 P. Demers, 1990, Si de Gaulle lÕavait su. (Joliot, lÕatome et la
Francophonie, suite), http://www.er.uqam.ca/nobel/c3410/SF29.htm,
(INSN.0825.9879)
20 P. Demers, 1990, Si de Gaulle lÕavait su. (Joliot,
lÕatome et la Francophonie), http://www.lisulf.quebec/SF30bis.htm,
(INSN.0825.9879)
Les politiciens qubcois auraient pu alerter lÕopinion
publique. LÕautorit canadienne, pour raison d'tat, se rsumait 2
anglophones du Gouvernement dÕOttawa : le Premier ministre Mackenzie King et
son ministre Clarence-Decatur Howe, qui se sentaient forts de lÕapprobation
tacite du ROC Rest of Canada. LÕautorit canadienne, dÕailleurs dpendante de
lÕautorit britannique et encore plus de lÕautorit amricaine, a fait vivre
les Qubcois, y compris les rares d'entre eux qui tions participants du
projet, sous une chape de silence et dÕignorance. Du moins, nous tions chez
nous. Mais les Franais et les autres internationaux se sentaient encore plus
prisonniers de leurs engagements garder le secret. Il rgnait une psychose
qui sÕest continue aprs la guerre et qui a conduit lÕexcution des poux
Rosenberg, probablement innocents. Cette aventure aurait pu se drouler tout
autrement, pour le bnfice des Qubcois et de lÕhumanit non-anglophone. - Il
a fallu 3 Franais une charge considrable de rflexion et de courage pour
alerter de Gaulle au cours dÕun entretien la sauvette le 11 juillet 1944.
Pourquoi les 2 Franais Halban et Kowarski ne lÕavaient-ils pas alert ds leur
arrive en Angleterre en juin 1940?
Les 3 Franais : Pierre Auger, Bertrand Goldschmidt,
Jules Guron.
Je voudrais tablir un parallle avec une autre grande
entreprise canadienne, la cration du chemin de fer transcanadien vers 1890.
Grande par le dessein de grande unification territoriale et par les ressources
publiques mises en Ïuvre. Elle fut associe une autre catastrophe. (fig.
10).
FigN10.jpeg
Fig. 10. Le chemin de fer au
Canada. vocation au cours du spectacle aux toiles son et lumire "L'cho
d'un Peuple", qui se tient chaque t depuis 2004 Casselman, Ontario,
Municipalit de La Nation. Le cration du chemin de fer transcanadien fut, 60
ans avant lÕnergie atomique, une grande ralisation du gouvernement canadien,
aid par lÕAmricain Van Horne. Parmi ses tout premiers usages, se place la
rpression du soulvement des mtis francophones de la Saskatchewan en 1885.
En 1885 comme en 1943, le pouvoir anglophone d'Ottawa
servait une grande leon : il pourrait gouverner la Confdration
canadienne, cre en 1867, sans couter la voix politique des francophones,
voix qui passait alors par la personne du Mtis Louis Riel. Du moins Riel fut entendu
publiquement. En 1943, la loi fdrale des mesures de guerre empcha toute
possibilit de ce genre.
Bien quÕincomplte encore, la voie ferre transcanadienne
allant jusqu'en Saskatchewan en 1885 permit au gouvernement conservateur
d'Ottawa, dirig par lÕorangiste Sir John Alexander Macdonald, de transporter
des troupes rgulires, dont les Fusiliers Mont-Royal de Montral, afin de
rprimer un soulvement des mtis francophones et catholiques mcontents. Les
mtis n'avaient aucune aide extrieure, ils eurent quelque succs militaire
avant leur dfaite Batoche. Ils furent traits avec rigueur au nom de la
Reine Victoria. Leur chef Louis Riel fut pendu par dcision d'un jury
entirement anglophone. Les mtis taient peu nombreux, mais l'enjeu tait un immense
territoire o le pouvoir central ne voulait pas rencontrer d'opposition ses
plans d'immigration anglophone. Ils furent rduits lÕimpuissance politique.
On peut voir dans cette rpression un gnocide et dans le 1er Ministre
Macdonald un assassin, selon Maggie Siggins. Cependant le Canada honore sa
mmoire, au point d'imprimer son effigie sur chaque billet de 10 $. (fig. 11), (fig. 12) 21, 22, 23, 24.
FigN11.jpeg
Fig. 11. Bois-Brls, reportage
pique sur Louis Riel et son peuple, Jean-Louis Roux, Thatre dÕaujourdÕhui,
1967.
21 Toile du Qubec, Sur la Rbellion des Mtis de
Saskatchewan et Louis Riel, http://www.toile.com/search?q=Louis+Riel+les+r%25C3%25A9bellions+des+m%25C3%25A9tis&sen=tle
22 University of Saskatchewan , Louis Riel, http://library2.usask.ca/northwest/background/riel.htm
23 J.-L. Roux, Les Bois-Brls, 1967,pice de thatre, Thatre
dÕAujourdÕhui .
En 1962, il y a Riel de John Coulten, une pice de
thtre produite l'occasion du 75e anniversaire de sa mort. Cinq ans plus
tard, c'est l'opra Louis Riel. Le livret est de Mavor Moore, avec la
collaboration de Jacques Languirand, sur une musique d'Harry Somers. Il y a
aussi cette anne-l la pice de thtre Bois-Brls de Jean-Louis Roux, un
reportage pique sur Louis Riel et son peuple.
http://www.pcr-rcp.ca/fr/sm/3124
PCR, Louis Riel
1844-1885 : le portrait inachev d'un dmocrate.
http://www.pcr-rcp.ca/fr/sm/3l
Comme nous sommes loin de la gnrosit que certains
politiciens britanniques comme O'Connell et Gladstone, voulaient dployer, la
mme poque et sous la mme reine Victoria, envers les Irlandais (le Home
Rule)! Ces politiciens ont-ils eu une pense pour les Mtis et Riel 25, 26.
FigN12.jpeg
Fig. 12. Sir John Alexander
Macdonald sur le billet de 10 $ Can. Le premier des Premiers ministres du
Canada, grand homme des "Canadians". Il a affirm son pouvoir en
faisant pendre son adversaire politique Louis Riel.
L'enjeu de cette rpression rappelle une autre
catastrophe mieux connue : le Grand Drangement No 1 des Acadiens, oeuvre de l'Angleterre et non du Canada
inexistant alors. taient concernes une population francophone dÕenviron 15000
et une immensit territoriale qu'il fallait rserver aux plans plus ou moins
long terme de l'immigration anglophone. L dj, il nÕtait pas question
dÕaccorder une voix politique francophone cette rgion que les colons
anglophones commenaient occuper.
Je voudrais chercher une autre analogie en histoire de
France, avec la guerre de Vende et celle des Chouans en Bretagne au XVIIIe,
parce que l'origine du conflit est comparable, elle rside dans une recherche
d'quit politique. Auprs d'un grand nombre de Franais, la Rvolution n'a pas
su satisfaire les esprances engendres par la convocation des tats gnraux
en 1789. Les protestataires de France taient plus nombreux que les mtis, et
ils avaient des ressources trs suprieures celles des mtis. Ils furent
traits sans piti 27.
---------------------------------
25 wikipedia,
Home Rule, http://fr.wikipedia.org/wiki/Home_Rule
,26 wikipedia, O'Connell, http://fr.wikipedia.org/wiki/Daniel_O%2527Connell
27 LÕInternaute, Histoire des Chouans, http://www.linternaute.com/histoire/motcle/532/a/1/1/chouans.shtm
Autres documents.
Paul Brouzens, son tude fortement documente sur le Laboratoire
Joliot. Une fois publie par le CTHS, elle fera peut-tre comprendre pourquoi de Gaulle en
Angleterre n'a pas connu, ds leur dbut et dans la suite, les travaux des 2
Franais migrs 28.
Bertrand Goldschmidt, 2 livres (fig. 13) 29, 30, 31.
Wladimir Paskievici sur Goldschmidt 32.
Michel Pineault 33.
Ginette Gablot (fig. 14) 36.
----------------------------------------
28 P. Brouzeng Paul, professeur mrite de l'Universit
Paris-Sud
Communication : L'exil outre-Atlantique, au Canada notamment, de
physiciens atomistes franais, en rsistance au cours de la Seconde Guerre
mondiale. Au 133e congrs Qubec, juin 2008,
http://cths.fr/co/communication.php?id=3594
29 Socit nuclaire canadienne, Bertrand Goldschmidt,
http://www.cns-snc.ca/history/pioneers/b_goldschmidt/goldschmidt.html
30 B. Goldschmidt, Le complexe
atomique, Paris,
Fayard, 1980 (15,4 cmX23,5 cm), 487 p., ISBN 2-213-00773-X
31 B. Goldschmidt, Pionniers de l'atome, Paris, Stock, 1987, 484 p.
32 W. Paskievici, Vie de Bertrand Goldschmidt. Confrence indite,
prononce une runion de la Socit canadienne de l'nergie atomique,
Trois-Rivires, en prsence de Bertrand Goldschmidt. 1982. Le jour des
funrailles de Gilles Villeneuve.
33 M. Pineault Michel, Directeur de la publication 2005, Doisneau
chez les Joliot-Curie, Un photographe au pays des physiciens, 273X273 mm, CNAM,
ditions Romain, ISBN 2-84350-210-1
36 G. Gablot, 2008, CNAM. Documentation.
FigN13.jpeg
Fig. 13. Le Complexe atomique,
exemplaire ddicac. Pour Pierre Demers pionnier qubecquois de l'nergie
atomique,
mon souvenir du laboratoire de
Montral 1942-46,
Trs amicalement, Bertrand
Goldschmidt, 13 mai 1982
FigN14.jpeg
Fig. 14. Ginette Gablot. Merci
Ginette Gablot qui m'a encourag et document. Elle a ralis une exposition
itinrante concernant Joliot. dont la prochaine tape est annonce pour octobre
2008 au Ple universitaire des Basses-Laurentides Sainte-Thrse au Qubec 33,
36.
Annexe 1.
Georges Urbain et
le concours d'agrgation des sciences physiques 1939.
FigN15.jpeg
Fig. 15. Georges Urbain. Photo
merci Ginette Gablot.
Dans ce concours, la question de chimie tait d'intrt
historique. Elle portait sur les terres rares et voquait ainsi la personne de
Georges Urbain, chimiste franais dcd depuis peu (12 avril 1872 - 5 novembre
1938). (fig. 15)
30. Or Lon Lortie, mentionn plus haut, fit sa thse de doctorat
sous la direction de Georges Urbain, sur les proprits du crium. Ë Georges
Urbain on attribue la dcouverte de 2 lments du groupe des terres rares : le
celtium ou hafnium et le lutcium. Intrt supplmentaire de cette question,
celui-l touchant ma carrire. Cette question est reste grave dans ma
mmoire. La classification des terres rares dans le tableau des lments
prsentait alors un problme considrable. La question de chimie du concours de
1939 a ainsi contribu orienter mes recherches, principalement aprs 1970,
sur la classification des lments et sur un systme mathmatique qui lui est
associ, que j'ai appel systme du qubcium 34.
Annexe 2.
Des tudiants comme
chair canon.
Des tudiants comme chair
canon. LÕUniversit a fait sa part dans lÕeffort de guerre.
Denis Plante, archiviste. archives@archiv.umontreal.ca 35.
Le projet Manhattan. LÕUniversit de Montral participe
de manire scientifique lÕeffort de guerre. CÕest sous le nom de Çprojet
ManhattanÈ que sont labors en secret, dans les locaux du Pavillon principal,
les principes de la bombe atomique. Sous la direction de Hans von Halban, un
groupe de scientifiques franais, italiens et mme des professeurs de
lÕUniversit se joignent cette mission.
Le laboratoire est oprationnel partir de mars 1943. Le
mandat du groupe de recherche est le suivant, dÕaprs W. Eggleston dans son
livre CanadaÕs Nuclear Story: ÇUtiliser lÕexpertise en eau lourde acquise
Paris et Cambridge pour produire le plus vite possible un racteur eau
lourde lÕuranium naturel.È
LorsquÕil est interrog sur le rle de lÕUniversit dans
ces travaux ultrasecrets, Mgr Olivier Maurault rpond: ÇLe National Research
Council occupe depuis cinq ans des locaux dans quelques ailes (destines au
futur hpital universitaire) de notre btiment. Il nÕest permis personne de
lÕUniversit dÕy pntrer. Et nous nÕavons aucun rapport avec les chercheurs
qui y sont enferms.È
Merci aux allis.
Pour remercier les Canadiens de leur aide durant la guerre, le
gouvernement de Grande-Bretagne vient dvoiler deux plaques. Le duc dÕdimbourg
se prsente le 17 mai 1962 pour remercier ceux qui ont travaill au projet Manhattan
mais, huit ans plus tt, le 14 septembre 1954, la duchesse de Kent tait venue
dvoiler une plaque pour souligner la participation du contingent du
Corps-cole dÕofficiers canadiens de lÕUniversit de Montral. Cette unit a
fourni quelque 1200 officiers aux forces armes du Canada, rappellera-t-elle.
Ils ont servi dans la marine, lÕarme et lÕaviation au cours des campagnes en
Afrique, en Italie, en France, en Belgique, en Hollande et en Allemagne.
DÕautres ont donn leur vie pour dfendre la libert
proclame dans la Charte de lÕAtlantique. Dieppe, les les Bevelen et
Walcheren, en particulier, ont t tmoins de leur hroque sacrifice. Sur la
plaque, on peut lire: ÇQue leur gloire nous soit un exemple, que leur conduite
nous inspire et que la terre trangre sous laquelle ils reposent leur soit
lgre.È (fig. 16).
FigN16.jpeg
Fig. 16. Andr Bachand, de
lÕUniversit de Montral, fit confectionner une plaque de bronze, portant entre
autres les noms des Franais et des Canadiens scientifiques du Laboratoire de
Montral. Il l'a fait fixer la btisse de l'Universit de Montral. Elle fut
dvoile le 17 mai 1962 en prsence du duc d'dimbourg. Vue partielle de la
plaque.
34 wikipedia, Georges Urbain, http://fr.wikipedia.org/wiki/Georges_Urbain
35 Plante Denis, archiviste, Des
tudiants comme chair canon. LÕUniversit a fait sa part dans lÕeffort de
guerre. http://www.forum.umontreal.ca/numeros/2000_2001/forum_00_11_06
article09.html
Annexe 3.
Les 5 brevets
franais.
1939-1940. Ceci complte la documentation de la
figure 4 montrant le brevet
franais sur le perfectionnement des charges explosives. Avant mon arrive et
durant mon sjour dans le laboratoire Joliot, je reconnais maintenant que
Joliot, Halban, Kowarski et Francis Perrin furent fort occups par la rdaction dÕun total de 5 demandes
de brevets qui ont marqu en toute primeur lÕhistoire mondiale de lÕnergie
nuclaire. Je cite un texte dÕAnne Prost. 36
Ç En compagnie de Francis Perrin, les trois
physiciens dposrent les 1, 2, et 4 mai 1939 et les 30 avril et 1er mai 1940
cinq demandes de brevet relatifs, entre autres, un "Dispositif de
production d'nergie" (couvrant le principe de la plupart des racteurs
nuclaires), au "Procd de stabilisation d'un dispositif producteur
d'nergie" (couvrant la stabilisation du fonctionnement des racteurs),
aux "Perfectionnements aux charges explosives" (principe de l'arme
atomique), au "Perfectionnement aux dispositifs producteurs
d'nergie" (enrichissement) et aux "Perfectionnements apports aux
dispositifs de production d'nergie" (coeurs htrognes).
...
Les documents dvoils par la Royal Society tmoignent de
l'avance dont disposaient les scientifiques franais dans le domaine nuclaire
: dans la notice ncrologique qu'il a consacre Frdric Joliot en 1960, le
physicien britannique Patrick Blackett crivait en effet qu'"il y a peu de
doute que, si la guerre n'tait pas intervenue, la premire raction en chane
auto-entretenue au monde aurait t obtenue en France. È
Plusieurs pays ont reconnu ces
brevets. 37
36Anne Prost. Sciences physiques et de la
matire. Des secrets nuclaires franais rvls l'occasion du 75me
anniversaire de la dcouverte du neutron, ADIT - http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/43569.htm
37 C. Gilguy, Un bon exemple de protection dans le
domaine nuclaire: L'histoire des brevets de base de l'quipe Joliot, http://www.dissident-media.org/infonucleaire/protection_brevet.html
Rsum.
1939. Septembre. J'tais en France depuis octobre 1938,
o je prparais le concours d'Agrgation des sciences physiques l'cole
normale suprieure rue d'Ulm. Une fois les preuves termines, mon
agrg-prparateur Pierre Grivet, futur Acadmicien, me conseilla de choisir
entre le laboratoire de rayons cosmiques de Louis Leprince-Ringuet et celui de
Frdric Joliot-Curie de physique nuclaire au Collge de France. Ë cause de la
tradition de Rayons-X et de radioactivit de mon professeur Ernest Gendreau l'Universit
de Montral, je choisis celui de physique nuclaire. Mon premier contact au
Collge de France fut avec Hans von Halban. J'ai appris depuis ce temps que peu
avant mon arrive, des brevets furent demands par Joliot, Halban et Kowarski
au nom du CNRS en mai 1939, l'un d'eux intitul : "Perfectionnements aux
charges explosives" No 971.324. Il dcrit la possibilit d'une raction en
chane explosive de l'uranium, propage par les neutrons.
1940. Je devais faire des recherches sur les neutrons
jusqu'en mai, et rencontrer des personnalits qui ont marqu l'histoire : Lew
Kowarski, Irne Joliot-Curie, Pierre Se, Charles Leblond, l'Italien Bruno
Pontecorvo, le Chinois Tsien-San-Tsiang etc. A cette poque, Jacques Allier
amenait Paris le stock mondial d'eau lourde de l'usine de Norvge. Mais
l'incroyable perce des Allemands Sedan au mois de mai allait m'obliger
rentrer au Qubec.
1943. J'entrais au Laboratoire de Montral, continuation
de celui de Joliot au Collge de France, situ dans la btisse de l'Universit
de Montral, cr sur l'initiative de Halban. Je poursuivis l mes recherches
sur les neutrons jusqu'en 1946. Ce laboratoire canadien a abouti la cration
de ZEEP et de plusieurs autres piles. ZEEP fut la 1re pile fonctionner en
dehors des tats-Unis. Quatre Qubcois y ont travaill et ont eu dans la suite
une carrire scientifique : Paul Lorrain, dcd en 2006; Jacques Hbert,
Colette Fortier et moi-mme qui survivons.
2008. Quelles furent les consquences pour le Qubec et
pour moi-mme, de ces vnements que j'ai vcus et auxquels j'ai particip
modestement? Je prsente un bilan sommaire. Pour moi, j'y ai trouv ma voie
dans la science de l'atome. Pour la langue franaise, ce fut une catastrophe
l'insu des intresss.
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tard, c'est l'opra Louis Riel. Le livret est de Mavor Moore, avec la
collaboration de Jacques Languirand, sur une musique d'Harry Somers. Il y a
aussi cette anne-l la pice de thtre Bois-Brls de Jean-Louis Roux, un
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