LISULF

Science et Francophonie

No 55 - septembre 1996

Assemblée générale 1994, discussion, 1re de 2 parties

Science et Francophonie paraît quatre fois par année sous la responsabilité de la LISULF, Ligue internationale des scientifiques pour l’usage de la langue française.

Éditions PUM 1996, 1200 Latour Saint-Laurent (Québec ) H4L 4S4 747 2308 fax 7480603 Internet c3410@er.uqam.ca

Le rédacteur en chef : Pierre Demers

Dépôt légal BNQ, BNC; France, Belgique. 3e trimestre 1996 INSN.0825.9879

   

Table des matières

Éditorial. L’Assemblée générale de 1994

Le Conseil de la LISULF

Discussion sur le thème "L'usage du français en science à l'Université" (Assemblée générale 1994, le samedi 29 mai 1994), 1re partie

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Éditorial. L’Assemblée de 1994

  Le 29 mai 1994, plusieurs collègues se sont exprimés sur un sujet controversé lors de notre assemblée annuelle qui fut particulièrement animée et génératrice d’idées, tout en restant ordonnée et courtoise. Nous avons eu la bonne fortune d’obtenir la collaboration précieuse de Jacqueline Blanchard, qui se chargea de déchiffrer la bande magnétophonique. Nous pouvons dès lors publier la transcription verbatim presque intégrale des paroles échangées, aux lacunes et erreurs de lecture près, en respectant les formes du langage parlé de chacun. Nous avons cru bon de la livrer sans plus attendre (elle a plus de deux ans mais reste d’actualité), malgré ses imperfections; on appréciera sa vivacité et sa saveur de document-vérité. Les témoignages recueillis nous rendront service par leur pertinence et par l’autorité des intervenants. o

 

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Pierre-Louis Maubeuge

Comme une odeur de pétrole

La recherche du pétrole en France des origines à 1945

216 pages Pierron 1996

Dans toutes les bonnes librairies 180FF ISBN 2.7085-0148-8

Après un premier livre nous racontant son aventure et celle de ses prédécesseurs dans le monde, P.-L. Maubeuge comble ici une lacune en décrivant l’histoire de la recherche du pétrole en France et ses balbutiements, surprenante sous bien des aspects!

Parmi les gens considérés comme des illuminés ou des pionniers audacieux, les "admirables fous de l’or noir" ne furent pas des moindres! Grâce à eux, il y eut en France Pechelbronn, Gabian, le Bugey et bien d’autres découvertes et, les succès de l’après 1945 étaient inscrits en filigrane dans les actions antérieures. Rassembler les éléments historiques de ces recherches fut une gageure et surtout, il fallait rendre hommage à ces clairvoyants, ces initiateurs, qui, au milieu d’une passivité générale, s’obstinèrent et dirent leurs raisons. Voici décrit décrit dans un tour de France complet, et à l’aide de données inédites et, parfois stupéfiantes cette exceptionnelle épopée. Voici aussi décrits les indices les motivant.

D’origine lorraine, docteur ès sciences, Pierre-Louis Maubeuge a été conseiller géologique permanent des mines de fer de France, pour la Lorraine. Comme chercheur indépendant il fit paraître de nombreux mémoires, cartes, publications. Président d’une commission géologique internationale pendant seize ans. Expert national près la Cour de Cassation et près la Cour d’arbitrage de la Chambre de Commerce International.

Il a eu aussi une carrière de géologue pétrolier avant de créer sa propre société, défrayant les médias sur toute la France qui le surnommèrent le "Père du Pétrole Lorrain"!

L’Académie des Sciences d’URSS convia cet "Amateur" non fomctionnaire, à venir présider une de ses propres réunions à Moscou et Oulianosk où on le nomma "L’Enthousiaste".

(Extrait de la couverture)

Pierre-Louis Maubeuge est Membre d’honneur de la LISULF

 

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Le Conseil de la LISULF

Pierre Charlebois

Gabrielle Cloutier

Louis de Kinder, secrétaire

Pierre Demers, président

Alice Derome

Pierre Lefebvre

Paul Rémillard, trésorier

 

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Pierre-Louis Maubeuge

par lui-même, titres, travaux, textes

Par Pierre-Louis Maubeuge, présentation de Pierre Demers

Les Cahiers de Science et Francophonie, No 3.

216 pages PUM 1996

10 $ payable au pair à Montréal à l’ordre de PUM, port payé.

ISBN 2-9802454-2-9

  Poursuivant la série amorcée en 1992, PUM fait paraître ce cahier, le 3e de la série. Nous recommandons aux lecteurs de se procurer ce petit ouvrage. Ils y trouveront une impressionnante liste de ses publications, faites en français. L’auteur y a consigné le résultat de ses explorations du bassin de Paris, formation de l’époque secondaire s’étendant de Paris aux Vosges, où il a trouvé et exploité des ressources pétrolières. Chargé d’honneurs et de distinctions multiples, il a bien mérité de la science et de la langue française, par son travail opiniâtre, fait indépendamment de l’Université, par ses propres moyens. Il est secrétaire perpétuel de l’Académie et société lorraines des sciences à Nancy.

Pierre-Louis Maubeuge est Membre d’honneur de la LISULF

 

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 Discussion sur le thème

L'usage du français en science à l'Université

1re partie

Assemblée générale 1994. Le samedi 29 mai 1994

 

Relevé des cassettes magnétophoniques établi par Jacqueline Blanchard, spécialiste en Administration personnelle, juin 1994. Correcteur : Pierre Demers. La rédaction ne garantit pas l’exactitude des exposés et des dialogues. Il n’a pas été possible de soumettre les textes aux auteurs avant publication.

Dans l’ordre de leur première intervention :

Pierre Demers, Claudette Gariépy, Jean Carette, Paul Rémillard, Louis de Kinder, René Durocher, Jean-Claude Guédon, Jean Rémillard, Hector Poblete, Rodrigue Tremblay, Alice Derome, Gabrielle Cloutier, Léon Collet, Pierre Couillard, Louise Brouillet, Normande Alarie, Yvette Delliac, Michel Lapierre.

Demers. D'abord j'aimerais vous souhaiter la bienvenue .... une discussion comme celle qui s’annonce a des exigences que je vous prie de respecter ... certains parlent d’une bilinguisation galopante à l’Université .... mais écoutons la 1re intervenante, Mme Gariépy du SEUM.

Claudette Gariépy

Gariépy. À l'Université de Montréal nous sommes près de 2000 membres regroupant les employés du secteur bureau, des techniciens de toutes natures et des professionnels. Donc je reviens, j'ai fait une petite parenthèse devant l'anglicisation, alors, je vais parler un petit peu à cet égard, un petit historique dans le monde syndical, on sait que le monde syndical à toujours été et demeure un fervent défenseur du français au travail au Québec et à cet égard j'aimerais vous rappeler deux luttes importantes linguistiques qu'ont menée au début des années soixante-dix, les Travailleurs Unis de l'automobile. Il y avait par exemple la General Motors, certains d'entre vous se souviendront très bien de cette grève à Sainte-Thérèse où pendant trois mois les salariés, les travailleurs ont fait la grève pour obtenir la reconnaissance du français comme langue de travail. Ensuite il y a eu la fameuse grève en 1972, de la United Aircraft qui est devenue Pratt and Witney, donc encore une grève qui a duré plusieurs mois et qui avait cinq mille travailleurs en cause, 70% d'entre eux étaient francophones et personne, y avait aucune possibilité pour les francophones d'obtenir des postes de cadres, s'il ne connaissait pas l'anglais ni même à l'embauche à la promotion qui pour obtenir une promotion, si on ne connaissait pas l'anglais, on était comment dire, on n'accédait pas à des postes.

Donc ces grandes luttes syndicales-là n'ont pas été étrangères à l'adoption de la Charte de la langue française en 1977. Le gouvernement a légiféré pour que le droit de travailler en français soit reconnu au Québec. Mais depuis, nous sommes en 94, y a eu un recul alarmant du droit de travailler en français dans le monde du travail et l'Université de Montréal n'échappe pas à cette vague. En 1990 le journaliste, monsieur Pinard qui a fait un travail assez important, en 1990, sur quel était l'état du français dans le monde du travail et c'était assez alarmant de voir ça. Pourtant la francisation, c'est la responsabilité des entreprises, ce n'est pas celle des syndicats selon la loi. Donc puisque c'est celle des entreprises s'est sûrement celle aussi de l'Université de Montréal une grande université francophone qui se targue enfin de s'identifier comme telle, donc de préserver le caractère francophone, étant située au sein d'une société, société québécoise dont la culture est française.

Nous les travailleurs nous sommes un peu comme les sentinelles de la langue de travail. On essaie de défendre notre droit de travailler en français mais cette responsabilité-là dont je parlais précédemment relève vraiment des entreprises ou de l'institution. Nous savons, ça je pense que je ne l'apprends pas à personne, que par expérience la bilinguisation des francophones signifie l'anglicisation à court terme, et les anglophones à ce moment-là lorsque le phénomène de la bilinguisation, les anglophones n'ont plus aucune raison de faire des efforts d'apprendre le français, et dans leur quiétude ils adoptent, c'est pas remis en cause, alors il ne font pas plus qu'il ne faut les efforts pour apprendre le français. On sais qu'en 77, dans le cadre de la charte de la langue française, le législateur n'a pas jugé nécessaire de préserver le français dans les universités. Tout le domaine de l'enseignement, CEGEPS et tout ça a été exclu de la loi. Y a seulement les dispositions des articles exécutoires. Le premier article de la charte, l'article 46, où l'employeur doit prouver la nécessité d'une autre langue il faut que cela soit absolument nécessaire.

Autre ça bon, pourquoi on puisse dire pourquoi avoir exclu les universités? Est-ce que, est-ce que l'on peut répondre en disant est-ce que l'on ne légifère pas sur le savoir, est-ce que la sacro-sainte autonomie des universités ne doit pas être touchée? Est-ce que, on se rappelle du début des histoires des universités, c'était le clergé qui était, qui était à la tête, alors, pensait-on, que le clergé étant francophone était pour préserver cette belle langue le français? Alors on ne se souciait pas trop. Sauf que nous assistons à l'Université de Montréal à une anglicisation galopante

... en 77, dans le cadre de la charte de la langue française, le législateur n'a pas jugé nécessaire de préserver le français dans les universités. Claudette Gariépy

de nos postes et de tout le personnel, et je vais y revenir un peu plus tard, donc notre réaction syndicale face à notre employeur a été de dire nous n'allons pas accepter ça. Nous sentons que nous sommes les premières victimes.

Donc premières victimes, pourquoi? Parce que lorsque par exemple l'Université embauche des professeurs, on passe par moniteur, chargé de cours, professeur agrégé, professeur titulaire, et on peut s'en sortir très bien sans avoir appris le français. Y a aucune, il n'y a pas de politique comme telle, on incite à, avec les treize facultés ou les centres de recherche, mais il n'y a pas d'obligation. Et nous sommes les premières victimes, parce que le personnel de bureau, dans les différents départements, facultés, un peu partout à l'université, parce que les employés sont un peu partout à l'université, donc on a un bon son de cloche de tout ce qui peut s'y passer, bien, travaillent avec ces gens qui n'ont, qui sont souvent allophones, qui ne sont pas, baragouinent comme on dit le français et ont à communiquer verbalement avec eux et à faire, à dactylographier leurs travaux, les rapports de recherche, de laboratoire, les articles, qu'ils devront publier dans les publications scientifiques. Donc ça se passe en anglais.

Nous sommes encore les premières victimes, quand des étudiants étrangers, surtout au cycle supérieur, maîtrise et doctorat, parce qu'au premier cycle c'est une condition préalable, dès leur entrée à l'Université, ils auront pas leur diplôme s'ils n'ont pas la connaissance du français, le réglement-cadre de l'Université a été changé à cet effet mais lorsque nous sommes en présence nous, les employés de soutien, avec les étudiants de maîtrise, doctorat, et post-doctorat, dans les centres de recherche un peu partout à l'Université, nous devons les recevoir, répondre à leurs questions, les diriger vers tel ou tel service de l'Université et encore là, ça se passe en anglais.

Que dire maintenant des Directeurs de département qui sont allophones eh oui, ça existe à l'Université, et que peu ou prou ne parlent peu ou prou le français, et qui bon leur secrétaire est obligée de travailler en anglais avec eux, de parler en anglais avec eux et ils décrètent tout de go comme ça, que dans leur département, ça va se passer en anglais. Maintenant, les chercheurs, on sait que les fonds de recherche sont importants, que ça donne beaucoup à la renommée de l'Université et va-t-on exiger que les chercheurs apprennent le français? On sait qu'ils l'ignorent dans beaucoup des cas, l'université ne va pas les obliger à apprendre le français, donc les employés de soutien sommes encore nous les premières victimes.

Tout ça fait en anglais. Communications parlées et écrites, surtout dans les centres de recherche, dans certaines facultés, où il y a plus, alors ça devient un milieu de travail avec des îlots anglophones. Que dire maintenant de la politique de l'Université à cet égard? Bon, Elle laisse à la discrétion tant qu'à pour le personnel, que le personnel enseignant, à l'embauche ou, pour les étudiants de cycle supérieur, elle laisse à ses treize facultés et une quarantaine de centre de recherche, d'obliger les professeurs et les chercheurs, enfin, d'avoir une politique interne, ça devient de petites PME qui eux-mêmes décideront comment les enseignants, les professeurs, les chercheurs, apprendront le français. Un français, on ne voudrait pas être trop exigeant, un français dit fonctionnel, parce que la loi dit aux professionnels, la loi 101, dit aux professionnels qu'il faudrait pour rester au Québec avoir un français fonctionnel. Mais même à eux on leur demande pas ce français fonctionnel dit, pour enseigner. Alors, nos étudiants, à l'Université reçoivent un enseignement, en anglais souvent.

Alors ces professeurs sont pourtant des modèles d'intégration, sont pourtant des élites un peu dans la société, et pourquoi est-ce qu'ils ne pourraient pas apprendre la langue de la majorité? Est-ce que se serait un simple respect pour le personnel francophone, avec lequel ils travaillent, est-ce-que ce serait, de la part de l'Université une attitude de mépris ignorant le droit de travailler en français, pour son personnel? On se pose la question. Alors, étant placés, nous, le personnel de soutien à l'enseignement obligés de communiquer, pour travailler, en anglais, là où les professeurs, les chercheurs, ignorant le français exercent leur fonction, et où les étudiants étrangers ne connaissent pas un mot de français, nous nous sommes bien sûr élevés contre cette situation pour défendre toujours le droit de travailler à tous en français, dans la langue française ici à l'Université.

Les conséquences que l'on connaît, ça se passe un petit peu en catimini, on ne pense pas que c'est à ce point crucial, alors le personnel s'anglicise, quant une université s'anglicise, et que dire de ce laxisme qui nous pose un préjudice dans notre droit de travailler en français. L'Université agit comme si différents départements, services et facultés n'étaient pas inter-reliés entre eux, en fait n'avaient pas de relations entre eux au niveau fonctionnement et elle a tendance à les considérer comme des entités autonomes, n'ayant aucun contact entre elles.

Pourquoi tout à coup, l'Université de Montréal, demande aussi massivement la connaissance de l'anglais à des postes qui auparavant ne l'exigeaient pas? Est-il normal qu'une grande université francophone d'enseignement et de recherche, il y ait de plus en plus de postes avec l'exigence de la connaissance de l'anglais? Est-ce que nous les employés de soutien, au nombre de près de 2000, on va être complices d'une anglicisation dans notre milieu de travail?

En tant que syndicat, lors des dernières négociations, en été 93, de notre convention collective, on avait proposé une liste fermée de postes avec l'exigence de l'anglais. Vous pouvez bien comprendre que ça a été une fin de non-recevoir et sans possibilité de discussion. Pourtant ça existe cette même liste fermée-là à l'Université du Québec, et l'Université Laval qui est une grande université de recherche aussi francophone, n'a pas du tout de problème que nous connaissons à l'Université de Montréal. Nous sommes, dans le secteur universitaire, un cas, je dirais.

Donc, la solution, que faire pour que la langue de travail, dans le milieu de l'enseignement, et en l'occurrence dans le milieu universitaire demeure, est-ce que ce serait une belle concertation entre différents organismes tel que le nôtre, est-ce que se serait lors d'une commission parlementaire que les universités deviennent, soit dans la loi, la loi sur la langue qui serait modifiée, en tous cas il faudrait y voir sérieusement, parce que s'est très alarmant pour nous.

Merci.

Demers. Nul ne possède la vérité. Ce texte est d'une franchise et d'une argumentation qui me frappent. Nous avions causé ensemble, mais je ne vous avais pas encore entendue, devant un exposé aussi clair... Je vous signale deux choses : d'abord il y a des automobilistes parmi nous je crois, et faites attention, surveillez vos intérêts. Il y a des vingt-cinq cents ici, si vous en manquez, alors je pourrais peut-être vous aider.

Alors je vous signale la première ligne de l'éditorial du No 46 de Science et Francophone. Si l'on en croit la loi 101, les Québécois, les Québécoises bien sûr aussi, ont le droit de recevoir biens et services dans la langue officielle. Premier exemple qui se présente à nous, l'enseignement universitaire, le résultat des recherches savantes, qui se font dans les universités. Alors c'est tellement évident qu'on ne s'en occupe pas, qu'on n'y pense guère, à ce premier article, mais il est là. Comme je suis chargé de présider la séance et non pas précisément d'intervenir, je réclame avec votre permission le droit de faire cette quasi-intervention, ......ce n'est qu'une citation si vous voulez. Et je vous invite à prendre des notes, et quand le cinquième participant annoncé se sera exprimé, j'inviterai les autres personnes présentes à prendre la parole. Alors, maintenant c'est au tour de monsieur Carette.

 

Jean Carette

Carette. ... je suis, j'assume depuis un an déjà la vice-présidence d'un syndicat des professeurs et des professeures comme on dit je ne sais pas si c'est très français, mais enfin on ne va pas ergoter là-dessus, qui regroupe un millier de membres du corps enseignant, de façon permanente pour les distinguer des chargés de cours. J'ajoute que c'est un syndicat qui est affilié à la CSN ce qui est très rare dans les cas de professeurs, nous sommes les seuls au Québec, je le dis parce que monsieur Paquette n'a pas pu venir, monsieur Rioux n'a pas pu venir, et comme je travaille avec eux disont qu'ils sont donc à moitié ou au tiers représenté par moi quand même.

J'ai écrit à monsieur Demers l'essentiel de mon intervention, je voulais dire d'abord que pour moi le français n'est pas seulement une langue qui est celle de mon pays d'origine en ce qui me concerne, elle est une manière de penser et d'être, c'est ce que l'on appelle une culture. Autrement dit, je ne pense pas qu'on puisse considérer que le français est en simple compétition comme un vêtement, une couleur face à une autre, un vêtement face à un autre, face à un autre dans la compétition internationale au niveau des publications scientifiques. On dit simplement que le meilleur gagne alors s'il parle français alors ça ira bien.

Je ne pense pas que ce soit un bon principe, pour la défense et la promotion de la langue française précisément parce que la langue ce n'est pas seulement un habit, un vêtement ou une couleur qu'on donne à une pensée, c'est aussi une structure qu'on donne à une pensée. Deuxième élément que je voulais partager avec vous, nous sommes dans un milieu multi-culturel, vous savez par exemple que et ça vous donne une idée de l'avenir, plus de la moitié des élèves primaires de la CECM sont des allophones, ça n'est pas un handicap selon moi, c'est un défi supplémentaire, je pense que nous devons tenir compte, en particulier en milieu universitaire, de cet aspect il me semble que l'UQAM le fait en grande partie, avec semble-t-il moins de problème et de drame que l'Université de Montréal. Enfin ça on en reparlera peut-être tantôt.

C'est d'autant plus vrai que statistiquement nous avons pratiquement la moitié, un peu moins de la moitié de nos professeurs, membres du syndicat, sont des immigrants de première génération. Et dans ces immigrants de première génération, la moitié ne viennent pas de pays de langue française. Ce qui ne veut pas dire qu'ils ne savent pas parler

... la langue ce n'est pas seulement un habit, un vêtement ou une couleur qu'on donne à une pensée, c'est aussi une structure qu'on donne à une pensée. Jean Carette

français d'ailleurs. Alors, j'ai mis ça simplement parce que pense qu'il est important que nous ne fassions pas de la question de la langue française, une question de confrontation, mais davantage une question de concertation, de construction en commun, d'une culture québécoise, qui est encore à se chercher, qui est encore à se définir.

Bon par rapport au rôle du syndicaliste, je dirais que en ce qui nous concerne, nous mettons un point d'honneur, mais je dis bien un point d'honneur, mais je dis bien un point d'honneur c'est pas juste un mot, c'est un mot choisi, un point d'honneur plus qu'une priorité à respecter évidemment la qualité de la langue, dans toutes nos communications, et Dieu sait si nous en faisons, dans notre journal syndical, dans nos communiqués qui partent toutes les semaines dans les mille petits pigeonniers des professeurs, dans nos interventions également au niveau de la rédaction de nos conventions collectives, c'est pas toujours très heureux, parce que ce sont des textes juridiques, et la moindre modification, des fois, peut faire sourciller un spécialiste du droit syndical, alors donc on est obligés de revenir à des formules très alambiquées, pour protéger nos droits paraît-il, mais je dois dire que nous faisons un effort là-dessus.

Je viens je sais que la négociation n'est pas très à la mode, dans le secteur universitaire, c'est un état public, on préfère nous imposer des lois, cent deux ou cent-quatre vingt dix-huit, cependant au niveau de l'Université du Québec, on vient de mener une négociation pendant quatre ans avec l'ensemble des syndicats de l'Université du Québec, on est vingt-neuf syndicats à travers les douze constituantes, sur les problèmes de gestion de fonds de retraite et d'assurance collective, et nous avons passé les dernières heures, les derniers milles de cette négociation, qui a abouti à un accord très important, pour la première fois dans l'histoire de l'UQ, nous avons passé les dernières à corriger le français de l'accord que nous venions de conclure. Ça, c'est un précédent important, j'espère que les syndicats locaux vont pouvoir s'inspirer de cette expérience.

On n'a pas les mêmes problèmes qu'à l'Université de Montréal, je suis un peu surpris d'apprendre ça, sur les problèmes d'affichage et autres, bon, je l'apprends, c'est une information donc, donc nous allons faire notre profit, peut-être pour terminer mon intervention, qui pourrait être simplement d’apporter un certain nombre d'éléments à la discussion qui va suivre, je veux dire on ne peut pas d'abord demander au syndicat de tout faire, nous sommes actuellement dans une position extrêmement délicate, dans la mesure où le bras du législateur a passé par dessus celui du négociateur. Par conséquent, nous dans une position actuellement défensive, sur le plan de la défense de nos conditions de travail, de la promotion d'un rôle modernisé du professeur d'université, nous sommes en passe avec des coupures budgétaires assez impressionnantes, qui vont d'année en année s'aggraver, nous sommes en passe ici avec des problèmes de violence à l'intérieur de l'institution qui sont particulièrement inquiétants, bon, je pourrais multiplier les exemples, je dois dire, même si on peut le déplorer, que le dossier de la promotion du français même si on n'est pas en point d'honneur comme je le disait tout à l'heure, c'est un dossier parmi d'autres, et parmi d'autres peut-être aussi pertinents socialement.

La deuxième chose que je voulais dire, c'est par rapport, ils ne sont pas là c'est dommage, mais nos papiers qui nous a été distribués de l'Association générale des étudiants en lettres, communications, sciences humaines, arts de l'UQAM c'est aussi compliqué que ça parce qu'il y a plusieurs associations générales en, ... les associations générales des étudiants sont en général bien particulières. Très peu générales. Et l'Association générale des étudiants de l'UQAM nous a distribué un texte dans lequel elle s'élève contre le caractère discriminatoire du test obligatoire d'entrée à l'Université en français, comme on dit, je trouve qu'ils charrient pas mal.

J'aurais voulu leur dire directement, mais ils ne sont pas là, franchement, j'ai l'impression que ça n'est pas une marque de discrimination au contraire, une marque de promotion de la langue française, qui, quand on regarde les copies que nous corrigeons, moi, je passe mes vacances à me relire du bon français, pour pouvoir me récupérer un peu. J'ai l'impression sinon, que je vais être entraîné dans un torrent épouvantable, et que je ne saurai plus distinguer un féminin d'un masculin, un pluriel d'un singulier, à cause justement de ce que je peux lire, à travers mes corrections, il me semble qu'il était temps, qu'il était grand temps que l'on fasse quelque chose et qu'on rende effectivement l'admission à l'Université conditionnelle au succès à un examen de français.

Mon fils a passé cet examen, et je me suis dit en moi-même, parce qu'il a toujours réussi à travers le secondaire, et le CEGEP à éviter bien des sanctions qu'il aurait pu mériter, je me suis dit : pourvu qu'il rate, parce qu'au moins il va avoir 3 cours de français, il va être obligé de les passer sinon, la porte va se f ermer. Et ce n'est pas du tout, donc à mon avis, une marque discriminatoire, je pense même, il faudrait que ça aille plus loin que ça, vous savez qu'on a des règlements par exemple dans nos corrections de travaux qui nous permettent d'attribuer 10 % de la note à la qualité du français, malheureusement cette possibilité que nous avons, n'est pas respectée par une grande majorité de professeurs correcteurs. Moi, je souhaite personnellement que effectivement, les directions d'universités, sans toujours nous casser les pieds, la tête, et le reste avec l'idée de la grande compétition internationale et du contexte mondial, et autres baratins, que les directions d'universités sachent comme on dit, mettre leur culotte, et imposer une qualité du français, non seulement aux étudiants, mais aux professeurs.

Et je terminerais là-dessus, quand j'ai appris que nous allions, ici dans cette université avoir, des tests obligatoires de français pour nos étudiants, j'ai pensé en moi-même automatiquement, ça serait une très très bonne idée que cette mesure soit appliquée aux professeurs eux-mêmes.

Demers. Je vous félicite d'avoir respecté l'horaire. Je prierai monsieur Durocher de prendre maintenant la parole. Au cas où je m'absenterais, je prie monsieur Rémillard ou un autre membre de la LISULF de se charger de la présidence temporairement. Je la reprendrai tout à l'heure. Voulez-vous, monsieur Rémillard, vous en charger si je m'absente?

Paul Rémillard. Non monsieur le Président, car étant secrétaire je ne peux ...

Demers. Louis De Kinder, voulez-vous présider en mon absence, pour quelques secondes, ou quelques minutes.

de Kinder. Oui, M. le Président.

Demers. Alors, monsieurDurocher, je vous donne la parole, et je m'absente pour quelques minutes.

 

René Durocher

Durocher. Je crois que je vais apporter un point de vue très différent de ce que l'on vient d'entendre. Professeur depuis vingt-sept ans, administrateur universitaire depuis une dizaine d'années, ce qui n'est pas

... Les universités francophones du Québec sont des établissements de langue française, cela signifie que l'enseignement y est offert en français et que la langue de communication au sein de l'institution est le français. René Durocher

incompatible avec le rôle de professeur, soit dit en passant, j'ai vécu et je vis, presque quotidiennement le dilemme de l'usage du français en science et à l'université. Un dilemme c'est quelque chose où on doit choisir entre deux options qui comportent toutes les deux des avantages et des inconvénients. Regardez le Larousse, c'est la définition. C'est dire que les positions que l'on peut avoir sur cette question sont presque par nécessité des positions nuancées et modérées.

Il n'y a pas de bien absolu d'un côté et de mal absolu de l'autre côté. Les universités francophones du Québec sont des établissements de langue française, cela signifie que l'enseignement y est offert en français et que la langue de communication au sein de l'institution est le français. C'est la règle générale, c'est ce qui est généralement vécu dans nos universités et je suis étonné d'entendre que l'Université de Montréal est une université en voie d'anglicisation et ou université bilingue. Si vous allez à Ottawa, à Sudbury, les vraies universités bilingues, vous allez voir que ce n'est pas à ça que ça ressemble exactement.

L'Université de Montréal est une université de langue française et là où il y a un problème et cela est un problème réel qui est soulevé par le syndicat, problème que je connais bien parce que j'ai été vice-doyen à la gestion à l'Université de Montréal, je connais le problème du 1244; là où il y a un problème c'est qu'une université c'est aussi une institution de recherche et c'est une institution qui doit communiquer avec l'extérieur. Communiquer avec l'extérieur prend deux sens. D'abord, se faire connaître et communiquer le fruit de ses recherches à l'extérieur de cette université et même à l'extérieur du Québec, à l'extérieur du Canada, mais aussi communiquer avec des gens de l'extérieur et là je pourrais vous donner des centaines d'exemples où fréquemment l'Université de Montréal comme sans doute dans d'autres universités on doit recevoir des gens, des étrangers, à qui il est utile ou convenable de communiquer avec lui et il est convenable de communiquer avec lui en anglais. Une question de savoir-vivre, une question aussi d'utilité, une question aussi de notre propre intérêt aussi là-dedans.

Quant à ce que madame Gariépy disait sur les chercheurs, sur les professeurs, on pourra en parler au moment de la discussion et il y a des nuances à apporter là-dessus. Mais c'est là qu'est le coeur du dilemme. C'est que dans une université il y a l'enseignement, il y a la participation à la vie interne de l'université mais il y a aussi la recherche et le rayonnement à distance. C'est là qu'il est le dilemme. Avant d'aller plus loin, je voudrais faire état de certaines réalités qui me paraissent pertinentes pour notre sujet. D'abord on est en Amérique du Nord avec tout ce que cela implique. Le monde anglophone a une place prépondérante dans les domaines de la science et de la technologie. La langue anglaise occupe une place encore plus prépondérante dans le système scientifique, ce sont des choses bien connues, mais sauf qu'il faut en tirer des conclusions à certains moments qui ne sont pas des conclusions simples et simplistes.

Mais aussi comme universitaires nous avons la responsabilité de former des étudiants et des étudiantes qui seront en mesure de concurrencer les meilleurs étudiants et étudiantes formés dans les autres pays. Et ça c'est une lourde responsabilité pour des universitaires, pour un universitaire. Et je vais en rajouter une cinquième considération, suite à ce que je viens d'entendre. La mission première d'une université c'est l'enseignement et la recherche. C'est pas d'abord les problèmes syndicaux. Alors je vais simplement poser les choses comme elles doivent l'être à mon avis.

Avec la croissance accélérée, dans certains cas, exponentielle, de l'accumulation des connaissances, la globalisation des marchés, les nouvelles technologies de communication tout le tintouin, je ne sais pas comment vous avez appelé cela, le baratin que l'on fait là-dessus, ce sont aussi des réalités qui posent un grand défi pour le Québec francophone s'il veut rester à la pointe des connaissances et dans le peloton des pays développés et ça, ça a beaucoup de conséquences pour l'ensemble de notre population, pas seulement pour les universitaires. Dans le contexte qui est le nôtre en cette fin du XXe siècle il me paraît presque impossible à toutes fins utiles de mener une carrière scientifique à l'échelle canadienne ou internationale sans devoir utiliser l'anglais dans ses activités de recherches et de rayonnement.

Par ailleurs je reconnais volontiers qu'il faut concilier cette nécessité avec le droit du personnel non-enseignant de travailler en français et ça j'insiste là-dessus, il faut trouver des moyens de concilier ces deux nécessités ces deux réalités, ça je pense que, on peut trouver des moyens, on peut négocier des moyens. Cela dit, m'importe parce que nous sommes membres d'un peuple francophone dont la survie et le

... plus une université se donne comme mission, et non seulement se donne mais est capable de vivre en fonction de cette mission, une mission d'université de recherche, plus elle aura de problèmes dans ce sens-là. René Durocher

développement sont étroitement liés à la langue, de la promouvoir et de la défendre. Le meilleur moyen de faire c'est encore de bâtir et de développer des institutions et une vie scientifique francophone dynamique et de très haute qualité afin d'éviter que notre langue ne devienne synonyme de médiocrité et d'horizon borné pour notre peuple.

Il y a aussi bien d'autres moyens et je pense que le Québec depuis un certain nombre d'années, j'ai eu l'occasion de vivre cette différence comme étudiant et ensuite comme jeune prof. et maintenant, je pense que le Québec fait preuve de beaucoup de dynamisme dans un contexte qui est difficile, qui est très difficile.

Je pense par exemple à l'émergence et au développement de revues scientifiques québécoises de très haute qualité qui ont acquis une reconnaissance internationale. Je pense à des revues de transfert, de vulgarisation, je pense à nos associations scientifiques, que ce soit l'ACFAS, l'Institut d'histoire, qui sont des associations scientifiques dynamiques et moi aussi je crois que on atteint à l'universel à travers le particulier. Donc, je ne suis pas quelqu'un qui volt simplement à l'extérieur, non, je pense qu'il y a du travail à faire ici, et qu'on peut le faire en français et c'est très bien.

Donc et je pense aussi qu'avec les nouvelles technologies de communication ça pose des défis mais ça va peut-être nous permettre de trouver des moyens mais je vais laisser Jean-Claude Guédon qui est un spécialiste dans ce domaine en parler. Il n'en reste pas moins que notre première mission c'est de développer des universités qui soient les meilleures possibles et qui soient au niveau des meilleures dans le monde. C'est ça notre première mission. Et il y en a plusieurs qui ont soulevé et qui vont soulever sans doute, pourquoi à l'Université de Montréal il y a plus de problèmes qu'ailleurs?

Je pense qu'on pourra en parler et là je ne veux pas choquer personne, je ne veux pas provoquer ni être arrogant, mais plus une université se donne comme mission, et non seulement se donne mais est capable de vivre en fonction de cette mission, une mission d'université de recherche, plus elle aura de problèmes dans ce sens-là. Il y a sans doute moins de problèmes avec l'anglais à l'Université de Rimouski qu'il y en à l'Université de Montréal et c'est pas un pur hasard. Cela tient à la structure et à la mission même de nos universités respectives. Alors voilà quelques remarques que je voulais faire à ce sujet qui pourront ensuite faire l'objet de discussion.

 

Jean-Claude Guédon

Guédon. Je ne suis pas dans le sillage de René Durocher, opinion que je partage largement son point de vue et je voudrais avoir toute sa modération, mais je risque d'être un peu moins modéré dans mes emportements si je puis dire. Si je vous fais part de quelque chose comme Internet, c'est que je m'inscrit largement en faux contre toute politique ou toute psychologie du repli, de défense à outrance et disons du barricadage si ce mot existe, derrière des murs et ainsi de suite. Internet, son intérêt et ce que ça représente pour nous tous, une façon de penser une ouverture sur le monde, une façon d'être présent dans cette ouverture.

Je dirais d'emblée que toute politique d'une institution effectivement ou d'un pays, d'un peuple qui se veut membre de la communauté mondiale, on est sur la même planète après tout, dans un contexte écologique assez précis qui est celui exactement de la globalisation et de l'ouverture, c'est pas du baratin, c'est de la réalité. Avec des marchés qui sont maintenant à l'échelle de continent entier sinon à l'échelle de la planète entière, vouloir se retrancher chez soi, vouloir barricader tout par des moyens de lois, ou de contrôle tout à fait artificiel des marchés du travail locaux et ainsi de suite, avec des lois du genre linguistique, mène très très rapidement à la marginalisation, à l'isolement, à la baisse du niveau de vie et ainsi de suite.

Je trouve ça essentiellement ridicule pour dire le mot tel que je le pense, le plus fortement possible. Je crois d'ailleurs qu'on peut avoir un vocabulaire plus fort que ça encore. L'Internet qu'est ce que c'est, puisque je suis censé parlé de ça, c'est un réseau d'à peu près entre un million et demi et deux millions d'ordinateurs, inter-reliés dans le monde par un faisceau de protocoles qui fait que tout ces ordinateurs se parlent entre eux. C'est maintenant quelque chose comme vingt millions, vingt-cinq millions d'individus, dans le monde qui communiquent entre eux grâce à cet ensemble et c'est un ensemble qui double à chaque année actuellement. L'année prochaine nous serons quarante millions sur Internet, l'année suivante quatre-vingt millions.* Cela va devenir rapidement logistique, dans la mesure où bien entendu on arriverait rapidement à épuiser les ressources, de la population humaine de toute la planète si on continuerait à ce rythme-là trop longtemps.

Donc que c'est une population en fait assez privilégiée de gens qui ont fait généralement des études assez avancées, des cadres de compagnies, des bureaucrates de haut niveau, dans les gouvernements, qui sont reliés à ça et petit à petit l'ensemble de ce réseau se répand. Il y a des couches plus, moins éduquées, plus faibles si vous voulez économiquement, de tous les pays, d'abord industrialisés et même du tiers-monde maintenant. Qu'est-ce qui se passe sur Internet? Bien, tout le monde communique avec tout le monde. Et un des grands avantages de Internet, c'est qu'il existe au XXe siècle une lingua franca. Il existe l'anglais.

S'il y avait pas l'anglais, je ne pourrais pas parler avec mes collègues d'Israël, je ne pourrais pas communiquer avec mes collègues chinois, ou japonais, je ne pourrais pas parler avec mes collègues finnois, ou je ne pourrais pas parler avec mes collègues hongrois. Nous parlons tous ensemble en anglais. Cela ne veut pas dire que je suis pour la ... du même coup devenu complètement anglicisé. Cela ne veux pas dire que j'ai perdu ma belle parlure culturelle française, ce que je crois pouvoir abhorrer aussi bien que quiconque dans cette salle, ça veut pas dire que je suis complètement démoli sur le plan culturel, sur le plan de mon identité, n'ayez crainte, j'ai un sens très fort de ma propre identité, mais j'ai la capacité de m'ouvrir et de parler au monde entier et j'en profite et il profite de moi inversement parce que je leur donne des choses également.

Il y a quelques choses qui se passent là qui sont des phénomènes de collaboration, de travail d'échanges d'idées, extrêmement important, et

*NDLR. Au moment d’aller sous presse, nous voilà rendus en décembre 1996. C’est l’ocasion de comparer les relevés actuels avec les pronostics du prof. Guédon en mai 1994. Voici en substance les renseignements qu’il nous communique. Les relevés de mai 1996 indiquent 14,5 M (millions) de machines connectées sur Internet. Le nombre d’usagers par machine est évalué à 3 dans l’hypothèse basse et au double dans l’hypothèse haute. De plus, ce qu’on appelle nombre de machines est en réalité le nombre de codes d’accès, et ce code peut être employé par plus d’une machine, puisqu’il suffit d’un modem et d’une ligne téléphonique pour se brancher, à cause d’une mesure de sécurité appelée «fire-off». De la sorte, 40 M paraît comme un minimum pour le nombre d’utilisateurs en mai 1996 et le nombre de 80 M paraît plausible fin 1996. Le rythme de croissance dépasse le facteur 2 par année. Il est assez évident que le nombre d’utilisateurs dépassera les 80 M au cours de 1997 si ce n’est déjà fait. Les prévisions du prof. Guédon en 1994 paraissent largement confirmées.q

qui incidemment que vous le vouliez ou non, va se développer quoi que vous fassiez. Il est impossible de légiférer l'Internet. Je vous donne un petit exemple. Vous voulez bloquer l'Internet? Il suffit d'une petite auto près de la frontière, un émetteur-récepteur de radio par paquet, ça coûte deux cents dollars, et le signal passe par dessus la frontière, très facilement. N'importe qui qui voudra faire de la guérilla informationnelle contre une législature nationale pourra le faire à peu près impunément et peut déjà le faire à peu près impunément et dès que l'information a passé la frontière elle peut être réinjectée dans le système par n'importe quel moyen alors, la disquette, ou modem ou n'importe quoi. Toute personne qui a joué trois minutes avec un ordinateur le sait, c'est pour la même raison que Internet ne peut pas être tué, ça a déjà été inventé pour ça. Le régime de Internet c'était un système de commande décentralisé par l'armée américaine pour résister à une attaque nucléaire. C'est pas les lois du Québec qui peuvent dépasser l'impact d'une guerre nucléaire. Je m'excuse.

Donc si une guerre nucléaire n'est pas capable de détruire quelque chose comme Internet, c'est pas par une législation quelconque que vous allez arrêter ça. Donc nous sommes pris dans un système et je trouve que c'est plutôt bien, un système de communication. Un système de communication mondial, ou effectivement il y a une langue, une langue qui est devenue dominante, et Dieu merci elle existe, elle nous permet, à l'ensemble de la planète, de communiquer entre nous. Ça ne veut pas dire que nous ne pouvons pas développer des choses dans notre langue, sur cet Internet, loin de là, on peut faire plein de choses là-dedans.

On peut communiquer avec tout le monde en anglais on peut communiquer avec les francophones en français et nous le faisons. Il y a des forums francophones sur Internet. Vous dites non, dites moi pourquoi vous dites non?

Jean Rémillard. Parce qu'actuellement il y a tendance au sein des entreprises francophones, françaises et québécoises, à communiquer en anglais, en anglais exclusivement.

Guédon. Ça c'est leur problème.

Jean Rémillard. Eh ben, c'est notre problème aussi.

Guédon. Oui çà.

Jean Rémillard. Ça ça veut dire que par Internet on serait amené en tant que francophone à parler anglais.

Demers. S.’il vous plaît, monsieur Rémillard.

Guédon. En tout cas.

Jean Rémillard. Enfin.

Guédon. Si les compagnies veulent communiquer entre elles en anglais ça c'est leur problème, je ne peux pas légiférer cette chose-là. Je ne pourrais pas légiférer non plus, vous comprenez, c'est un genre de choses les gens pourraient communiquer en anglais de chez eux en anglais par modem vous allez faire quoi? Mettre un flic dans chaque maison? Non. Alors donc mais vous pouvez créer des forums en français. Vous pouvez créez des banques de données en français. Vous pouvez, et c'est ce que nous faisons les uns et les autres, vous pouvez intervenir de cette façon là. Vous pouvez en fait au lieu d'avoir une attitude défensive, vous pouvez adopter une attitude que j'appellerais beaucoup plus pro-active et offensive. Vous pouvez promouvoir les produits de la culture française.

Vous pouvez faire de la recherche et la publier en anglais pour qu'elle soit lue dans le monde, car tout le monde sait que si vous publiez en science en français vous perdez 50% de votre volume-auditoire immédiatement et de vos citations également mais vous pouvez immédiatement grâce aux moyens modernes, faire une traduction et rendre ça disponible pour votre communauté locale, et ça je suis pour et je pense que c'est une excellente chose à faire. C'est important d'avoir un enseignement en français, dans une population qui travaille en français, mais c'est important dans le monde actuel qu'il y ait une langue universelle qui permette à l'ensemble de la planète de communiquer, avec elle-même. Il se trouve que ce n'est pas elle cette langue universelle.

C'est bien dommage, j'aurais préféré que ce soit le français moi-aussi. Si on avait vécu au XVIIIe siècle, si les télécommunications modernes s'étaient développées au XVIIIe siècle il est probable que ç'aurait été le français. Le français a raté sa chance, c'est l'anglais qui l'a prise. Faut vivre avec, on peut se taper la tête contre un mur, et se dire c'est pas comme ça, mais c'est comme ça et ça continue de se développer comme ça.

Alors on peut refuser ça, moi je ne veux pas le refuser. Je suis navré c'est beaucoup trop tentant comme monde, c'est beaucoup trop agréable comme moyen de communication , c'est beaucoup trop riche. Je ne vais pas me rétracter sur une petite île, je ne veux pas jouer mon Robinson Crusoé culturel, je ne veux pas me perdre dans un petit coin du monde, je vais simplement m'ouvrir à l'ensemble du monde y compris bien entendu à ceux qui parle la même langue que moi. Je vois des sourires autour de la table.. .Souriez bien. Mais je sais très bien ce que je ferais. Et ce qui me rassure dans tout ça c'est que je viens de dire, c'est que, c'est pas possible de légiférer cette chose-là. Dieu merci, c'est une zone de liberté totale. Personne ne pourra jamais empêcher cette chose-là de se passer maintenant. C'est arrivé, c'est allé beaucoup trop loin. Il y a beaucoup trop d'ordinateurs de branchés maintenant. Il y a beaucoup trop de moyens de brancher les choses les unes sur les autres maintenant.

Alors il faut mieux vivre avec, il faut mieux s'inscrire là-dedans. Il faut mieux essayer d'arranger les choses, pour que lorsque l'on veut communiquer en français sur Internet on ne soit pas pénalisé, ça c'est important. Par exemple Internet ayant été créé par l'armée américaine, a été créé pour la langue anglaise effectivement, et du même coup pour des raisons qui sont reliées à ça on ne peut pas facilement faire passer des accents, des cédilles, des choses comme ça, les signes diacritiques de notre langue, la même chose se pose pour l'espagnol, l'allemand et ainsi de suite incidemment.

Eh bien, il y a maintenant un standard international qui va permettre de le faire, il suffit maintenant de promouvoir l'implantation de ce standard. C'est le fameux standard isolatent, qui permet de transmettre les choses de façon correcte. Si vous prenez par exemple le gaufred ?? de l'Université Laval, et si vous avez installé l'ensemble de caractères isolatents sur votre propre ordinateur, vous allez voir tous les accents apparaître sans problème sur votre écran.

Et la même chose avec l'Université de Grenoble, et on va, là il y a un choix à faire, ils sont un peu en avance. Ceux qui sont organisés comme je le suis reçoivent le message correctement, le prix c'est qu'actuellement ceux qui ne sont pas organisés de façon correcte reçoivent de la poubelle sur leur écran. Il y a un choix à faire, notre université, par exemple à l'Université de Montréal, a plutôt une politique un peu plus attentiste qui est de dire pour le moment mettons du français sans accent et quand le standard sera suffisamment répandu on mettra ce standard-là de façon à ce que tout le monde reçoive le maximum d'information le mieux possible.

Bon en tout cas, qu'est-ce que c'est que l'Internet? Je trouve que c'est une belle leçon, leçon non pas de rétractation, non pas une leçon d'isolement, pas une leçon de crispation, mais au contraire une leçon où on ouvre un espace à l'ensemble de la planète et que les gens de toutes les langues communiquent entre eux comme ils le peuvent et comme ils le veulent. Et il se passe des choses passionnantes là-dessus dans toutes les

... je trouve malheureux d'une certaine façon d'avoir à entendre encore des discours aussi, je dirais pardonnez le mot, RÉACTIONNAIRES. Jean-Claude Guédon.

langues du monde. Majoritairement en anglais parce que c'est devenu encore une fois, le protocole de communication universel mais il y a aussi des forums en français, qui se passent et qui marchent très très bien.

Je donnerais l'exemple de l'Université de Montréal qui a créé un forum à partir du département d'études françaises qui s'appelle Balzac. Et ce forum Balzac, fonctionne uniquement en français, et regroupe des quantités de gens y compris d'ailleurs beaucoup d'Américains qui s'intéressent à la culture francophone et qui, je dis bien francophone, pas française exclusivement et qui et qui communiquent parfois dans un français un peu bizarre parce qu'ils font des efforts pour écrire dans la langue française, mais ils le font d'une manière extrêmement sympathique et je trouve ça merveilleux.

Alors ça c'est des attitudes que j'aime. Ça c'est des attitudes d'ouverture. Ça c'est des attitudes qu'on se parle les uns les autres. On se replie pas, on se rétracte pas, on se coupe pas du monde, on parle au monde et on se laisse parler par le monde. Ça je trouve ça beaucoup plus prometteur que ce que j'ai entendu avant l'intervention de René Durocher et je trouve malheureux d'une certaine façon d'avoir à entendre encore des discours aussi, je dirais pardonnez le mot, RÉACTIONNAIRES.

Merci. Vous n'avez pas besoin d'applaudir

 Rémillard On va le faire quand même, car il y avait quand même des points intéressants.

 Demers.... immense réseau de ...............encore plus universitaire, encore plus .........langue française ...membres de la LISULF.......................la LISULF pourrait rendre service, pour m..................les exigences que...........................et celle des........................ la LISULF est là. et n'apporte rien ...la cause de l'université, de la science de la recherche, de la langue française.................................. deuxième idée possible.

 

Hector Poblete

Demers. ............s'exprimer sauf qu'il n'est pas là, .....c'est dommage parce que chaque point de vue est ntéressant à entendre................. est là...pour que cela soit consigné..................même s'il n'est pas là, avec votre accord je vais lire son texte.

AGE LETTRES ET COMMUNICATIONS SCIENCES HUMAINES, ARTS UQAM

Aux invité-e-s de LISULF,

Le but de notre présence, à cette assemblée, est pour vous faire part de la position de l'Association générale des sciences humaines, arts, lettres et communications de l'UQAM et de l'ensemble de ses 15.000 membres concernant le test obligatoire en français.

Instauré depuis 1989, le test est une initiative de la Conférence des recteurs et des principaux des Universités du Québec (CREPUQ).

Depuis, toute personne s'inscrivant à l'Université doit subir un test de français conçu et corrigé par le Ministère de l'enseignement supérieur et de la science.

Notre Associatiom, l'AGEUQAAM, est d'avis que le test de français est discriminatoire à l'endroit des étudiantes et étudiants de l'UQAM. Cette politique est une véritable injustice sociale car elle restreint, de la manière la plus éhontée possible, l'accès à l'éducation.

L'administration de l'UQAM avait prévu, pour 1993, faire du test de français une condition d'admission. Mais devant l'ampleur du désastre et la grande opposition étudiante, la direction de l'Université a fait marche arrière. Toutefois en 1994, la direction a apporté de nouvelles modifications à la politique du français enfin de continuer sa croisade.

Notre Association est donc déterminée à continuer de lutter contre le test de français qui se veut discriminatoire envers les étudiantes et étudiants.

En espérant que de cette rencontre nous pourrons tirer des liens de solidarité pour un accès sans discrimination à l'éducation.

Bien à vous HECTOR POBLETE

Responsable à la liaison interne

 

Rodrigue Tremblay

Demers. Dont acte.... Je vous invite à réfléchir à ce texte et nous allons maintenant écouter Monsieur Tremblay. Monsieur Tremblay vous avez maintenant la parole.

Tremblay. .................Merci beaucoup Monsieur Demers, je vous remercie de m'avoir invité à votre assemblée générale. Monsieur Demers est un homme dangereux.

Derome. C'est pas la récréation là?

Tremblay Après mes propos se sera la récréation. Mais j'allais dire que monsieur Demers est un homme dangereux, je lui ai parlé au téléphone, je ne savais pas qu'il enregistrait, tout ce que je disais, et y compris mes rires, ha ha ha......(Rire générale) ha ha ha......Avoir su cela j'aurais mis un peu plus d'ordre dans mes pensées.

Demers. Je vous ai enregistré avec votre accord.

Tremblay. Mes propos seront courts car l'on n’a que quelques minutes. Je déplore par contre qu'il n'y ait pas de journaliste parce que le débat-à qui est, que l'on voit poindre, est un débat que l'on va avoir dans l'ensemble de la société dans une dizaine d'années à une autre échelle, parce que les problèmes qui sont soulevés sont fondamentaux, les dilemmes et les paradoxes sont fondamentaux, et les solutions ne sont pas faciles à dégager. Je ne parlerai pas au nom de l'Université de Montréal, je pense que René Durocher mon collègue René Durocher a une position administrative, maintenant,

Durocher. Non, non, j'ai pas demandé au recteur et vice-recteur s'ils étaient d'accord........

Tremblay. Mais tu vas les persuader?

J'aimerais aborder la question de rentabiliser le français finalement ici, au Québec dans le monde universitaire comme dans la société en général sinon sous l'angle économique, très rapidement. J'ai été président de l'Association internationale, je participe à deux trois congrès annuellement, internationaux et je confirme ce qui a été dit, le monde scientifique est de plus en plus anglophone sauf à quelques endroits en France, et dans quelques pays comme la Belgique et la Suisse. Sous l'angle économique finalement, je dirais ces choses, premièrement le problème des Universités et des sciences, c'est le problème de la société en général. Ce n'est pas un problème qui est distinct, tellement distinct, des problèmes des entreprises, des maisons de courtage, des banques, des industries culturelles, c'est un problème qui est endémique dans toutes sortes de secteurs.

Ce n'est pas particulier au domaine scientifique. L'autre commentaire que je veux faire, cette rentabilité du français, en considérant que la langue, les langues sont des moyens de communications ce sont des instruments, des facteurs de production, c'est un capital, quand une personne investit dans une langue, c'est un capital, qui peut être plus ou moins rentable, selon l'usage, la demande qui découle, qui s'applique à cette langue, aux produits qui sont véhiculés par cette langue, la culture etc... Il est difficile, comme on l'a dit, d'endiguer des changements technologiques de se produire.

Présentement en Chine on essaye de limiter cette invasion des satellites, des ordinateurs et de l'informatique, parce que évidemment on veut continuer de contrôler, on veut continuer à contrôler l'information. Je voudrais faire remarquer que François Ier, en France avait essayé la même chose face à l'imprimerie, au XVIe siècle, en limitant le nombre d'imprimeries, en imposant une réglementation très restrictive, parce que la découverte de l'imprimerie en 1436, par Gutenberg, a amené un grand changement dans les langues qui est un peu contraire à celle que nous observons.

Il y avait une langue quasi universelle qui était le latin, qui était la prérogative des clercs. Avec l'imprimerie, Luther, entre autres, a pu imprimer des livres en langue populaire et ça a amené des changements sociaux, des changements linguistiques fondamentaux. Or nous vivons présentement une révolution technologique qui est au moins aussi importante que celle de l'imprimerie. C'est celle de la communication instantanée des données, des idées, et des informations, et ça ne fait que commencer à mon avis. Le CNM, ce phénomène Internet, ce n'est que le début, on est au début de cette grande révolution.

Or pour un petit peuple, qui parle une langue qui est un peu en retrait de ce courant comme au Québec, ça pose des problèmes fondamentaux que nous allons vivre dans les prochaines années de façon encore plus aigus que ce que nous vivons présentement. C'est que, comme on l'a mentionné, c'est l'anglais qui est la langue des XX et XXIe siècle.s Le français est une langue du XIXe siècle. J'aimerais bien que se soit le contraire mais, comme scientifique je dois constater que c'est la réalité. Au XIXe siècle, tout le monde qui avait une éducation devait apprendre le français parce que le français c'était la langue de la diplomatie.

... au niveau réglementaire, on est allé aussi loin que l'on pouvait aller. Il va falloir encourager la rentabilité. Rodrigue Tremblay

Présentement la langue de l'informatique, c'est l'anglais. Et, donc si vous faites des affaires, du moment que vous sortez de votre village etc... vous devez le faire en anglais. Si vous présentez des communications vous devez le faire en anglais. Si vous avez un ordinateur pour communiquer au niveau international vous devez le faire en anglais.

Donc ceci pose un problème de la rentabilité du français au Québec et ça pose aussi le paradoxe de nos investissements dans notre système d'éducation, qui entraîne au niveau primaire et au niveau secondaire, et au niveau universitaire, des gens qui vont utiliser une langue autre que la langue principale qu'ils apprennent dans ce système d'éducation. On voit le dilemme qui va se poser dans les prochaines années, la question est de savoir, est-ce qu'il y a une façon de concilier les choses, sans qu'on soit dépossédé parce que si votre capital est détérioré, déprécié vous êtes en quelque sorte dépossédé d'une valeur. Est-ce-qu'il y a des règles, des approches qui peuvent être prises, individuellement ou collectivement? À mon avis il y a très peu d'approches, très peu de mesures individuelles qui peuvent endiguer ce genre de choses.

Il y a des approches collectives, on peut dans d'autres domaines prendre des approches un peu plus collectives, dans le but de préserver certains acquis et dans toutes sortes de contextes de légitime défense finalement parce que le monde n'est pas parfait. Il y a de gros intérêts derrière cette révolution technologique qui s'entre-choquent, et dans le cas du Québec on est un peu comme une petite chaloupe sur les mers, de sorte qu'il y a des paquebots sur ces mers. C'est parce que j'entendais tout à l'heure, faut ouvrir au monde, il ne faut pas être naïf non plus, essayer de traversée l'Atlantique avec une chaloupe de 10 pieds, vous prenez des risques de vous noyer.

Ma conclusion, ma première conclusion, c'est que le caractère bilingue, de bilinguisation au Québec dans toutes les relations internationales m'apparaît inéluctable. Donc je sympathise avec le syndicat des employés de soutien de l'Université de Montréal, qui doivent dactylographier des textes en anglais, qui doivent recevoir des téléphones d'un peu partout à travers le monde en anglais, il m'apparaît que dans les années à venir, ça va être difficile d'empêcher cette bilinguisation.

... à quoi bon de dépenser dix ou quinze milliards de dollars, en système d'éducation et dire aux jeunes Québécois que, rendus en bout de ligne leur investissement en français n'est pas valable. Rodrigue Tremblay

On le voit en Suède, on le voit en Hollande, on le voit en dans d'autres pays qui ont des langues qui ne sont pas universelles, et ceci est presque inéluctable de ce côté-là. Maintenant jusqu'à quel point ceci doit procéder, est-ce que l'on doit encourager la primauté des publications en langue anglaise, et négliger complètement les publications en langue française, bien là c'est un problème politique à mon avis et non pas un problème d'une seule université.

Il faut qu'on ait un gouvernement qui ait une politique qui encourage, qui rende rentable les instruments pédagogiques en français en en faisant la promotion plutôt qu'en essayant de forcer l'usage d'une langue parce que je pense qu'au niveau réglementaire, on est allé aussi loin que l'on pouvait aller. Il va falloir encourager la rentabilité. L'enseignement de l'anglais va devoir se poursuivre à mon avis dans le système scolaire. L'autre dilemme, peut-être aussi un paradoxe, c'est lorsque le besoin de fonctionner dans la langue anglaise conduit à une autre étape où on fait appel à du personnel de langue anglaise. Ça c'est plus difficile à accepter. Et je pense qu'il n'y a aucune société au monde qui a fait ce geste d'ouverture, qui s'apparente à l'abnégation complète.

Aux États-Unis par exemple, les permis de travail sont très difficiles à obtenir et ce n'est pas un texte purement symbolique. Lorsqu'une université veut embaucher un professeur étranger, ils doivent démontrer qu'il n'y a pas d'équivalent sur place. Ici au Canada on a des textes semblables, mais ce n'est jamais appliqué parce que évidemment on pourrait arriver à la situation ridicule où ayant comme objectif le rayonnement international on se dit les Québécois n'ayant pas la langue anglaise comme première langue, ne sont pas aussi prolifiques dans cette langue donc on va nommer des gens qui sont entraînés en anglais. À ce moment-là on aura un paradoxe fondamental, parce que à quoi bon de dépenser dix ou quinze milliards de dollars, en système d'éducation et dire aux jeunes Québécois que, rendus en bout de ligne leur investissement en français n'est pas valable. Ça c'est un gros problème.

Il est possible que la population québécoise dans vingt-cinq trente ans décide de faire, de bifurquer vers l'anglais si c'est inévitable, mais il est

... que vous invitiez dans l'avenir, à l'avenir des journalistes, et même des caméras de télévision électronique pour que la population soit éveillée à ce genre de dilemme qui se pose. Rodrigue Tremblay

possible aussi qu'il y ait une consolidation et que l'on dise, que l'on trace la ligne dans le sable, parce que le bilinguisme est l'abdication économique de toute une industrie, l'État synonyme à mon avis de «on peut concilier les deux».

Donc ma conclusion, c'est qu'il n'y a pas de solution simple, mais les intérêts des Québécois doivent être préservés et il est tout à fait légitime que les gouvernements essayent de dégager des consensus dans la société pour défendre nos intérêts dans ce monde mouvant-là qui change de couleur quotidiennement sous nos yeux. Ce qui est nécessaire présentement, c'est d'avoir un débat sur cette question-là dans l'opinion publique. Mais la rectitude politique au Québec est tellement avancée que toutes les questions importantes sont mises sous le boisseau. On ne discute pas de ces problèmes-là et lorsque les problèmes seront devenus tellement aigus, il sera peut-être trop tard là pour mettre de l'avant des solutions qui soient non extrémistes. Le danger c'est que lorsque l'on attend la crise, on est confronté à aller complètement d'un côté ou complètement de l'autre.

Moi, je souhaiterais que l'on ait un débat et que vous invitiez dans l'avenir, à l'avenir des journalistes, et même des caméras de télévision électronique pour que la population soit éveillée à ce genre de dilemme qui se pose. Parce que ce sont des dilemmes comme le dit monsieur Durocher, l'Université de Montréal ne veut pas, nous à l'Université de Montréal,- je parle en mon nom propre, on n'est pas contre le français, mais il est évident que si on ne fonctionnait uniquement que dans notre petit univers, uniquement en français on se couperait énormément d'apports venant de l'étranger.

... c'est une compétence additionelle qui doit être rémunérée. Mais la personne qui s'occupe des dossiers étudiants n'a pas besoin d'être complètement bilingue, la même chose pour une foule de postes, mais il va falloir que l'Université peut-être s'assoie avec les syndicats et regarde quelles sont les tâches où c'est nécessaire. Maintenant je dis ça en passant.

Suite dans Science et Francophonie No 56 décembre 1996

Science et Francophonie No 66

Pour correspondre avec Science et Francophonie

Dernière mise à jour : 11 juillet 2000

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