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LISULF
Science et Francophonie
Janvier 2005No 89
"L'actualité, c'est nous"
Marceau Déchamp, DLF, Pierre Demers, GEMS, J.R.M.
Sauvé
Science et Francophonie
paraît 4e fois par année sous la responsabilité de la LISULF,
Ligue
internationale des scientifiques pour l’usage de la langue française.
1200, rue
Latour Saint-Laurent (Québec ) H4L 4S4
1 514 747 2308
c3410@er.uqam.ca Notre site : www.lisulf.qc.ca Le rédacteur en chef : Pierre
Demers Dépôt légal BNQ, BNC; France, Belgique. 4e trimestre 2004 INSN.0825.9879
Bureau du
Conseil : Pierre Charlebois, Gabrielle Cloutier, Louis de Kinder,
secrétaire-trésorier, Pierre Demers, président, Christian Pilote, René-Marcel
Sauvé. Paul Rémillard, trésorier sortant. Grammairienne : Gabrielle Cloutier.
LISULF, 1200,
rue Latour, Saint-Laurent H4L 4S4 (Québec)
Ce numéro,
daté de janvier 2005, paraît en décembre 2005. Reproduction permise avec
mention de l'origine. Publication électronique : www.lisulf.qc.ca
Presses Universitaires de Montréal Édtions PUM.
PUM 2005
Science et Francophonie No 89
Janvier 2005. Table des matières
•Bureau du Conseil......................................................................
.....1
•Éditorial. La langue française
gagne et se défend en appel : Syndicat vs General Electric Medical Section, .......................... ...... ....2
Pierre Demers
•Salariés vs GEMS en Cour de
Versailles, un message de la LISULF, ..3
Pierre Demers et Marceau Déchamp,
Défense de la langue française.
•L’armée et la crise d’octobre ........................................ ...... ..5
Capitaine (retraité) J. R. M.
Sauvé
•Courrier du lecteur . J. R. M.
Sauvé..........................,,,,,,,,, ....12
•Affichage libre.
Électromagnétisme, par Jean-Luc Dion ..................12
Ce numéro 89 de Science et
Francophonie, daté de janvier 2005, paraît en décembre 2005.
Cotisation 2006, $ Can et Euros
Merci de bien vouloir verser votre cotisation LISULF 2006
si ce n'est pas déjà fait.
25 $ ou 25 Euros, entité morale 200 $ ou 200 Euros
étudiant, 10 $ ou 10 Euros
NB, SVP. Il n'y a pas d'association viable sans membres qui
se cotisent.
Éditorial. La langue française gagne et se défend en
justice : Syndicat vs General Electric Medical Section GEMS
Pierre Demers
"Enfin, en France, un succès
juridique notoire de la langue française dans un domaine scientifique haut de
gamme : la fabrication de matériel médical tel que celui de l'imagerie
magnétique nucléaire. Les syndiqués de l'industrie sont plus intéressés à la
défense de la langue française que les syndiqués de la recherche, qui ont remué
le ciel et la terre au début de 2004 en clamant sauvez la recherche française,
sans dire un mot de la langue française. Référence SF86.html"
"Mais la justice est la
justice : elle permet des recours et appels. C'est ainsi que GEMS s'est pourvue
en appel devant la Cour de Versailles. Alertée par la DLF qui suit cette
affaire, la LISULF lance une invitation à tous et à toutes à appuyer la partie
syndicale dont le succès de janvier 2004 est mis en échec. Au moment d'aller
sous presse, l'appel sera entendu en janvier 2006".
Ce qui précède était imprimé dans
les pages du numéro précédent, No 88. Or l'audition prévue pour le 22 septembre
2005 a été reportée à la demande de la défense pour raison d'impréparation et
elle sera entendue le 26 janvier 2006,
Donc, nouvelle convocation : sus
à Versailles le 26 janvier 2006.
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Répétition partielle de
l'article de même titre paru dans le No 88 avec mise à jour des dates
Salariés vs GEMS en Cour de Versailles, message de la
LISULF
Marceau Déchamp, Pierre Demers
----------
À
tous, à toutes, le 18 septembre 2005 le 31 décembre 2005
Nous
vous engageons à témoigner de votre appui à DLF re GEMS par votre présence en
Cour de Versailles le 22 septembre 2005 à 9h le 26 janvier 2006 à 9h et
en communiquant avec DLF :
direction@langue-francaise.org
La
cause du français en science, qu'il s'agisse des travailleurs chercheurs ou des
travailleurs salariés d'industrie, c'est tout un, c'est la cause de la LISULF.
La
LISULF par son président
Pierre
Demers
(GEMS
est General Electric Medical section)
(LISULF
est la Ligue internationale des scientifiques pour l'usage de la langue
française)
---------
Documentation reçue de Marceau
Déchamp
From: "DLF 78"
<dlf78@club-internet.fr>
To:
<marceau.dechamps@laposte.net>
Subject: Appel GEMS
Date: Fri, 16 Sep 2005 09:29:37
+0200
COMMUNIQUÉ
L'affaire GEMS que nous suivons,
oppose les salariés à la direction de cette entreprise américaine installée à
Buc (78) et concerne une infraction à la loi du 4 août 1994 relative à l'emploi
de la langue française dans le travail.
Un premier jugement favorable aux
salariés a fait l'objet d'un appel par la direction de la GEMS. Cette affaire
sera à nouveau appelée, le 22 septembre à 9 h 00, devant la Cour d'appel de
Versailles, 5, rue Carnot.
Nous demandons à tous ceux qui
peuvent se déplacer de venir, avec nous, soutenir les salariés de la GEMS à
cette audience et manifester ainsi notre révolte contre le bannissement de
notre langue dans les entreprises installées sur notre sol national.
Pour ceux de nos adhérents et de
nos sympathisants qui ne peuvent nous rejoindre, du fait de leur éloignement ou
de leur indisponibilité, ce message a valeur d'information. Ils peuvent
témoigner leur soutien à
<mailto:direction@langue-francaise.org>direction@langue-francaise.org ,
le message sera acheminé aux représentants du personnel de la GEMS.
Nous vous copions, ci-dessous, le
communiqué de presse rédigé la section syndicale CGT de la GEMS.
Cordialement à tous.
Marceau Déchamps
vice-président
Défense de langue française
-------
COMMUNIQUÉ DE PRESSE
L'emploi du français en entreprise
en appel.
Le 11 janvier dernier, le
Tribunal de Grande Instance de Versailles a donné raison au syndicat CGT, au
Comité d'Entreprise et aux Comités d'Hygiène, Sécurité et Conditions de Travail
(siège et province) dans leconflit qui les opposait à la Direction de la
société General Electric
Medical Systems Europe.
Ce conflit portait sur
l'application de l'article L122-39-1 du Code du Travail qui stipule que tout
document contenant des instructions de travail pour le salarié doit être rédigé
(ou traduit) en français. Il s'agissait, pour les représentants des salariés,
de lutter contre une forme de discrimination qui met sur la touche tous ceux
qui ne dominent pas la langue imposée, les tient à l'écart de la vie de
l'entreprise et peut également servir de prétexte à licenciement.
Ce jugement est une première, une
victoire sans précédent, mais la Direction de GEMS ne désarme pas et a fait
appel du jugement. Grâce à nos propres efforts ainsi qu'à ceux de toutes les
associations qui nous soutiennent pour faire connaître notre action, nous
espérons une forte mobilisation le jeudi 22 septembre prochain* à 9 heures à la
cour d'appel de Versailles, 5 rue Carnot.
Notre but, outre de faire
reconnaître le bien-fondé de notre action, est d'obtenir une jurisprudence de
laquelle pourront se prévaloir tous les salariés qui subissent une situation
similaire à la nôtre.
Contacts :
Jocelyne Chabert : 06 84 22 58 04
Sylvie Chartier : 06 83 12 17 14
Syndicat CGT
*Nouvelle date : lors de
l'audition du 22 septembre 2005, la cause fut remise au jeudi 26 janvier 2006.
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L’armée et la crise d’octobre
CD, SSM, Officier d’infanterie et parachutiste, en service dans l’Armée
canadienne pendant 28 ans, l’auteur était au Québec pendant la crise d’Octobre
70. Géographe, spécialisé en géopolitique, il est l’auteur de Géopolitique et
avenir du Québec.
Peu importe ce que prétendent les
politiciens, il n’y avait en Octobre 1970 ni insurrection appréhendée, ni
rébellion majeure, ni coup d’État ni guérilla au Québec. Ottawa a littéralement
sorti le marteau-pilon pour écraser un groupuscule sans moyens et sans défense.
L’objectif réel des fédéraux était ailleurs. Lorsqu’un soulèvement populaire
implique plus de la moitié d’une population donnée qui descend dans la rue pour
se défaire d’un pouvoir incompétent et corrompu, on peut alors commencer à
parler d’insurrection. Au Québec en 1970, malgré quelques tensions sans
importance, personne où presque n’était prêt à sortir en masse pour se
débarrasser, soit du gouvernement d’Ottawa, soit de celui du Québec ou les deux
à la fois. Une insurrection ne se produit généralement que chez les peuples qui
possèdent leur propre État depuis assez longtemps et qui ont l’habitude de se
gouverner eux-mêmes. Ce fut le cas par exemple de la révolution française de
1789, alors que la France avait atteint plein statut d’État depuis 150 ans
environ, après une période formative de plus de 1200 ans. Ce fut également le
cas de la révolution russe de 1917, la Russie existant comme État depuis
presque cinq siècles, après avoir chassé les Tatares mongols du territoire.
Seuls les peuples habitués à se gouverner eux-mêmes peuvent prendre conscience
de leur état réel et se soulever en masse contre les pouvoirs établis. Les
peuples inféodés et colonisés, inaptes à se prendre en charge, sont incapables
de soulèvements d’une telle ampleur. Habitués à la soumission servile, l’idée
de se défaire du pouvoir qui les domine et les opprime se traduit rarement en
acte, sauf sous l’effet d’interventions en provenance de l’extérieur. Il leur
faut au préalable une classe moyenne instruite et apte à l’action. Dans les
colonies, ces classes sont formées la plupart du temps par les missionnaires et
la décolonisation peut s’effectuer ensuite par diverses pressions économiques
et politiques en provenance d’États extérieurs qui les supportent.
Les États-Unis sont une apparente
exception à la règle. La colonisation de la côte américaine de l’Atlantique
s’est faite par des colons qui apportaient d’Europe des connaissances, des
techniques et un savoir appris depuis longtemps dans leur patrie d’origine. La
plupart étaient lettrés, instruits et par conséquent possédaient les aptitudes
nécessaires pour une prise en charge collective, après une période de
colonisation assez courte, dans un milieu géographique exceptionnellement
favorable. Aucune région naturelle, ni au Québec ni au Canada, n’offre les
avantages œkoumènes de la plaine américaine de l’Atlantique, ni de la grande
plaine du Centre, ni même de la vallée de la San Fernando, centre de gravité de
la Californie, dont la population dépasse celle de tout le Canada. La
combinaison de tous ces facteurs est à l’origine de la naissance fulgurante
d’un État neuf, dont les dimensions dépassent tout ce qui s’est fait en Europe
au cours de deux millénaires d’histoire. De la fondation de Boston en 1620
jusqu’à la révolution de 1776, il s’est écoulé à peine 156 ans, ce qui est
inouï pour les autres États du monde, dont la période formative a varié de
quatre à douze siècles, souvent davantage. Cependant, sans l’aide diplomatique,
matérielle et militaire de la France de l’époque, il est probable et presque
certain que les Yankees de la Nouvelle-Angleterre auraient pu s’affranchir de
la domination de leur "Mère patrie ".La guerre de l’indépendance
américaine n’a pas été facilement gagnée, les Américains, comme tout autre
peuple dans l’histoire, étant divisés entre eux au sujet de leur soumission à
la Couronne d’Angleterre. Les conflits, les refus, les trahisons et les
révoltes contre le mouvement d’indépendance et pour le maintien du statu quo n’ont pas manqué. Les peuples
n’apprécient la liberté que lorsqu’ils se sont pris en charge pendant un
certain temps. Autrement, la liberté leur fait peur. Au nord des Amériques, le
Canada est un autre continent. Aussi étendu que l’Europe mais recouvert de
gigantesques obstacles naturels qui en limitent les possibilités démographiques
et économiques, il est devenu le fief des United Empire Loyalists, grâce aux
chemins de fer et aux
Les États-Unis sont une apparente
exception à la règle. La colonisation de la côte américaine de l’Atlantique
s’est faite par des colons qui apportaient d’Europe des connaissances, des techniques
et un savoir appris depuis longtemps dans leur patrie d’origine. La plupart
étaient lettrés, instruits et par conséquent possédaient les aptitudes
nécessaires pour une prise en charge collective, après une période de
colonisation assez courte, dans un milieu géographique exceptionnellement
favorable. Aucune région naturelle, ni au Québec ni au Canada, n’offre les
avantages œkoumènes de la plaine américaine de l’Atlantique, ni de la grande
plaine du Centre, ni même de la vallée de la San Fernando, centre de gravité de
la Californie, dont la population dépasse celle de tout le Canada. La
combinaison de tous ces facteurs est à l’origine de la naissance fulgurante
d’un État neuf, dont les dimensions dépassent tout ce qui s’est fait en Europe
au cours de deux millénaires d’histoire. De la fondation de Boston en 1620
jusqu’à la révolution de 1776, il s’est écoulé à peine 156 ans, ce qui est
inouï pour les autres États du monde, dont la période formative a varié de
quatre à douze siècles, souvent davantage. Cependant, sans l’aide diplomatique,
matérielle et militaire de la France de l’époque, il est probable et presque
certain que les Yankees de la Nouvelle-Angleterre auraient pu s’affranchir de
la domination de leur "Mère patrie ".La guerre de l’indépendance
américaine n’a pas été facilement gagnée, les Américains, comme tout autre
peuple dans l’histoire, étant divisés entre eux au sujet de leur soumission à
la Couronne d’Angleterre. Les conflits, les refus, les trahisons et les
révoltes contre le mouvement d’indépendance et pour le maintien du statu quo n’ont pas manqué. Les peuples
n’apprécient la liberté que lorsqu’ils se sont pris en charge pendant un
certain temps. Autrement, la liberté leur fait peur. Au nord des Amériques, le
Canada est un autre continent. Aussi étendu que l’Europe mais recouvert de
gigantesques obstacles naturels qui en limitent les possibilités démographiques
et économiques, il est devenu le fief des United Empire Loyalists, grâce aux
chemins de fer et aux contributions forcées des colons de Nouvelle-France
restés sur place, qui avaient accumulé un capital au terme de plus de 150 ans
de travail, de défrichements et de mises en valeur d’une terre dure et ingrate,
dans un climat difficile. Ce capital a fini par tourner à l’avantage des Québécois
avec la fondation des coopératives et du Mouvement Desjardins pendant la
seconde moitié du Dix-neuvième siècle, même si les United Empire Loyalists
cherchent par tous les moyens à le saisir et l’accaparer. Le Canada manque
d’œkoumène, ce qui veut dire d’espaces bas, plats, arables et favorables au
développement aisé d’économies organisées et aptes à servir de base au
développement d’États nouveaux. En réalité, seulement deux régions naturelles
s’y prêtent réellement : les basses terres du Saint Laurent, centre de
gravité du Québec, et, les basses terres des grands Lacs, devenues depuis l’ère
des canaux et chemins de fer le centre de gravité de l’Ontario et du Canada des
United Empire Loyalists, dans lesquelles se concentrent actuellement plus de 12
millions d’habitants. Après la guerre de 1812, après l’ouverture du canal Érié,
cette région a servi de rempart contre les tentatives ultérieures de
pénétration de l’Amérique Britannique du Nord en provenance des Etats-Unis, le
sud du Québec n’y étant plus exposé.
Le vaste mouvement migratoire des
Loyalistes du Québec vers l’Ontario méridional, qu’on peut situer entre 1860 et
1960, a été un important facteur de survivance et de croissance des colons de
Nouvelle France demeurés dans les basses terres du Saint-Laurent. Cependant,
les conditions d’un tel revirement de l’histoire et d’un progrès aussi
remarquable étaient en place dès 1760, grâce aux politiques de Richelieu envers
la Nouvelle-France, qui imposa le cadastre et la langue française à toute la
colonie, grâce à la guerre d’indépendance américaine et grâce au fait que
l’Angleterre devait limiter ses investissements en Amérique britannique du
nord, trop impliquée dans des guerres coloniales et continentales ailleurs. Ces
conditions étaient favorables à la survie des colons du Saint Laurent mais il
fallait aller plus loin. Au Québec, le clergé resté sur place se chargea, comme
dans toutes les colonies, de la formation d’une classe moyenne, qui fut
détruite avec la guerre 1837-39.Le clergé se remit de nouveau au travail et en
1960, sa tâche était à toutes fins accomplie. Le monde québécois pouvait se
séculariser. Jean Lesage et Paul Gérin-Lajoie orientèrent la politique
québécoise vers la construction d’un Etat nation, fondé sur les nouvelles
classes moyennes, formées par une réforme de l’éducation, ce qu’Ottawa et
l’Oligarchie ne peuvent ni admettre ni tolérer. La crise d’Octobre 70 a fourni
à Ottawa l’occasion de frapper un grand coup, non sans analogies avec la guerre
de 1837-39, qui ferait reculer le Québec de cinquante ou cent ans,
préférablement le fossiliser une fois pour toutes. La manœuvre n’a pas réussi,
en partie parce que le Québec de 1970 n’est pas celui de 1837-39, en partie
parce que l’armée s’est imposée des limites. En effet, le Québec de 1970 était
presque complètement libre de la présence loyaliste, grâce aux canaux et
chemins de fer et à l’ouverture en 1959 de la Voie maritime du Saint Laurent,
qui incita beaucoup d’entreprises anglophones à déménager vers l’Ontario
méridional. En conséquence, les Québécois prenaient pleine possession de fait
(de facto) et de droit (de jure) de leur territoire, avec lequel ils se sont
identifiés. Ce n’était pas une révolution mais la venue au monde d’un nouveau
peuple, de sa Nation et de son État. Ni Ottawa ni l’Oligarchie ne pouvaient
l’accepter. Quant aux militaires de 1970, ils n’obéissent plus aveuglément aux
ordres, comme dans le passé. Ce changement de comportement a diverses causes
mais trouve sa source aux procès de Nuremberg, qui ont suivi la seconde Guerre
mondiale. Les militaires allemands accusés de crimes de guerre et de crimes
contre l’humanité se sont défendus en prétextant qu’ils avaient obéi aux
ordres. Les tribunaux ont statué que, lorsque les ordres s’opposent à la
conscience morale d’un militaire, celui-ci doit obéir à sa conscience. Les
militaires allemands furent condamnés, exécutés ou envoyés en prison. Pour
Telford Taylor, procureur à Nuremberg, ces procès devaient constituer un
précédent pour des générations à venir. Le serment d’office du militaire engage
d’abord sa conscience et non une loyauté aveugle à un pouvoir arbitraire,
inconscient ou criminel. Mais il n’est pas toujours possible de désobéir aux
ordres pour suivre sa conscience. Tiraillé parmi des exigences contradictoires
entre les autorités, les situations réelles qui se présentent et les impératifs
de la conscience morale de chacun, les militaires de la nouvelle vague
pouvaient difficilement trouver des solutions qui conviennent. Une solution
s’offrait cependant : celle du syndicat militaire. Peu de Québécois savent
que les syndicats militaires existent depuis au moins un siècle et que
plusieurs armées sont syndiquées. Les premières armées syndiquées furent les
Scandinaves. Après la seconde Guerre mondiale, la nouvelle armée allemande
s’est syndiquée, histoire de ne plus se voir imposer des tâches criminelles et
immorales, comme l’invasion d’un pays qui n’avait pas attaqué l’Allemagne et
n’était aucunement justifiée. Le syndicat militaire impose aux gouvernements et
aux autorités un frein aux décisions arbitraires, incompétentes ou criminelles.
Loin de réduire sa capacité de combat à la guerre, le cas de la Finlande prouve
que le syndicat l’augmente, en la rendant plus compétente et mieux organisée.
L’armée finlandaise, qui a combattu l’armée russe qui avait envahi le pays fin
novembre 1939, se composait de syndiqués qui ont imposé aux autorités leurs
conditions en dépit de la gravité de la situation. Entre autres, le combattant
ne devait pas passer plus de huit heures par jour au combat. La nourriture, le
confort et la protection des combattants devaient être assurés en tout temps,
même dans les pires batailles. Les résultats furent surprenants,
incroyables : les Finlandais battirent une armée ennemie trois fois plus
grosse que la leur. La bataille de Suomussalmi, livrée à 40 sous zéro, entre
les 21 et 24 décembre 1939, a été unique dans l’histoire militaire, en ce que
jamais une si petite armée n’en avait battu une aussi grosse. Quelles que
furent les situations, les soldats finlandais n’étaient ni désemparés, ni
démoralisés. Leurs interventions furent terriblement efficaces contre les
Russes, qui avaient cru pouvoir battre la Finlande en deux temps trois
mouvements. Un soldat qui se sent en sécurité en arrière se bat autrement plus
efficacement qu’un autre qui se sent seul et menacé par ses propres autorités.
Au Moyen Orient, où ils avaient servi très nombreux, les officiers,
sous-officiers et soldats du Royal 22e Régiment se sont fréquemment liés
d’amitié avec leurs collègues finlandais et suédois, syndiqués. Ils ont vu
comment fonctionne un syndicat militaire. Ils ont connu une autre discipline,
plus réelle, plus intelligente, une discipline de soldats libres et
responsables, non pas libertaires, non pas une discipline fondée sur l’arbitraire
et l’incompétence des autorités qui décident n’importe quoi, mais une
discipline de gens qui ont acquis une certaine maturité et dont la compétence
militaire ne faisait aucun doute. La tentation du syndicat était dans l’air en
1970, après le retour du Moyen Orient de plusieurs bataillons du Royal 22e
Régiment. Les autorités à Ottawa s’en sont rendu compte et pour arrêter en
partant toute tendance vers la syndicalisation de l’armée, le ministère de la
Défense a entrepris une série de mesures qui tiendraient lieu de formules de
remplacement, introduites après 1971. Le résultat fut catastrophique. La
discipline militaire fut remplacée par l’indiscipline et l’insoumission. Il
aurait été plus facile d’introduire le syndicat militaire, qui aurait rassuré
les soldats et imposé en même temps une autre discipline fondée davantage sur
la responsabilité personnelle. Ce changement de mentalité n’a pas été accueilli
à Ottawa avec l’ouverture d’esprit qui s’impose en pareilles circonstances. Le
résultat : la démoralisation actuelle des forces armées. Pendant la crise
d’Octobre, les militaires Québécois, déjà révoltés contre l’incompétence,
l’inconscience et le manque d’intégrité des autorités d’Ottawa, furent vite
dépités des tâches ignobles qu’on leur demandait de faire, au nom de la Loi des
mesures de guerre, injustifiée dans les circonstances. C’est avec peu
d’empressement qu’ils se rendirent visiter les domiciles dont la liste leur
avait été soumise par la police. Souvent, personne n’était arrêté, ou, l’individu
arrêté était libéré en cours de route. Dans quelques cas, les militaires
offraient à la victime désignée un service de transport pour la conduire en
lieu sûr. Ce n’était pas le comportement de la police. Ce n’était pas non plus
le comportement des Loyalistes, nombreux dans les unités anglophones, qui
firent parfois preuve d’un zèle intempestif. Cette situation aurait pu
provoquer une bagarre générale entre militaires Québécois et Loyalistes mais le
gouvernement d’Ottawa s’empressa de renvoyer tous les militaires dans leurs
camps respectifs avant qu’il ne se produire quelque événement grave. Le retour
des militaires dans leurs bases marqua la fin de la crise d’Octobre mais non la
fin de la Loi des mesures de guerre, toujours en vigueur en 2005. Depuis ce
temps, et depuis la première victoire du Parti Québécois le 15 novembre 1976,
Ottawa, sous prétexte de "Canadian Unity Studies", a noyauté toutes les unités
francophones des Forces canadiennes avec des éléments anglophones et chargés de
surveiller les militaires Québécois. Même un régiment de réserve, comme les
Fusiliers Mont Royal, de la rue Henri Julien, à Montréal, a été noyauté et
jusqu’à récemment, on pouvait entendre parler anglais et seulement anglais dans
la salle des rapports. Inversement, de nombreux militaires Québécois ont été
envoyés dans des unités anglophones pour y être anglicisés, assimilés et
"disciplinés" de la bonne manière. Ces mesures ne sont qu’une partie
d’un vaste programme visant à enlever au Québec toute possibilité de se
défendre contre Ottawa. Québec et Ottawa sont réellement en guerre et il serait
naïf de la part des Québécois et des Québécoises de ne pas s’en rendre compte
et partant, de négliger d’entreprendre dès maintenant des mesures pour assurer
la sécurité et au besoin la défense du Québec au cours des événements qui
s’annoncent dans un avenir proche et par la suite, alors que le Québec viendra
au monde en tant qu’État national. Avec l’accès des autres provinces au statut
d’États reconnus, il est évident qu’Ottawa est condamné à disparaître, comme
Kalmar en Scandinavie, après la fin de l’Union du même nom. Il est donc
nécessaire de prévoir des réactions furieuses et dangereuses de la part des
autorités fédérales et de l’Oligarchie et d’y mettre le frein en partant.
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Courrier du lecteur, chronique nouvelle.
De J. R. M.
Sauvé
Pierre Demers
est dans l'erreur quand il écrit (S. et F. No 88) : "Le premier ministre
actuel du Québec(Jean Charest) a d'ailleurs déclaré en 2004 que la langue des
sciences est l'anglais, espéranto moderne des sciences". Ce n'est pas Jean
Charest mais Bernard Landry qui a fait cette déclaration. En voici les détails
et la réfutation par deux auteurs connus: Patrick Andries et Charles Durand. Un
ouvrage a été publié par Charles Durand à cet effet.
Faute
d'espace, la suite paraîtra dans le prochain numéro, No 90.
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Affichage libre. Science et Francophonie vous
signale...
Électromagnétisme
par Jean-Luc Dion, Loze-Dion 2002
2-921180-73-1, 40 $ CAN; 2-921180-74-X, 40 $ CAN
30