Outremont, le 22 mars 2007

 

 

Comité de sélection

Prix Marie-Victorin

Développement économique,

innovation et Exportation

Gouvernement du Québec

 

 

OBJET:      LETTRE D’APPUI AU PHYSICIEN PIERRE DEMERS

 

 

Chère Madame,

Cher Monsieur,

 

 

 

Par la présente, je désire témoigner de mon appui au physicien Pierre Demers, en vue de son obtention du Prix Marie-Victorin, décerné par Développement économique, innovation et Exportation, Gouvernement du Québec, pour l’année 2007.

 

Il y a environ vingt-cinq ans, j’ai fait la connaissance de l’éminent savant, Pierre Demers, dans le cadre de ma recherche sur la couleur minérale québécoise.  Mon objectif consistait à  mettre sur pied ma palette de peintre à partir du sol québécois et ce, à titre d’autodidacte.  Or, après une recherche infructueuse des minéraux verts et bleus sur le territoire québécois, facteur limitatif pour la constitution d’une palette raisonnablement complète, je me suis mis en tête de transformer la couleur des minéraux déjà existants. À cette fin, j’ai dû «imaginer» diverses méthodes de transformation.  L’une de ces techniques était  l’irradiation (laser, gamma, électron, neutron et rayon-X). 

 

Dans ce contexte, un professeur du département de Physique, École polytechnique de Montréal, me recommande de consulter les spécialistes de la couleur au Québec.  L’objectif consiste à recueillir leur avis concernant l’hypothèse sous-jacente à la modification de la couleur par irradiation, à savoir que la lumière peut modifier la structure cristalline des minéraux.  À ce moment-là, le Centre québécois de la couleur (CQC) est un lieu de regroupement de tels spécialistes, issus de différentes sphères. On me suggère particulièrement de rencontrer M. Demers à titre d’expert de la couleur par excellence au Québec.  Il s’agit de lui demander ce qu’il «pense» de cette idée surgie du néant.  À ma connaissance, M. Demers enseigne à cette époque à l’Université de Montréal.  Figure de proue du Centre québécois de la couleur, il en est le fondateur et président.  Selon toute évidence, M. Demers, très respecté de ses pairs, même les plus prestigieux, est un pôle de référence scientifique au Québec en matière de couleur, à cause de son enseignement, sa recherche et son implication dans le CQC. D’autres scientifiques abondent dans le même sens: «Vous verrez bien,  disent-ils, M. Demers est très connaissant en matière de couleur. Il dispose d’une mémoire encyclopédique. Comme un ordinateur, il prend une idée et, ouvrant l’un après l’autre les tiroirs de sa connaissance, il en dégage les associations possibles, établissant des comparaisons plus ou moins rapprochées. S’il existe une correspondance entre cette idée et le passé, il est le seul à pouvoir l’établir.»  Ce commentaire insuffle à la novice, que je suis en science, la confiance nécessaire à me propulser vers un tel savant.  Pendant trois heures, il me fait part de tous les renseignements surgissant du fond de sa mémoire, s’associant de près ou de loin à l’idée proposée (ex.: mimétisme animal,  sel d’argent capteur de lumière en photographie), jonglant avec eux et les formulant en un langage simple, me facilitant conséquemment la compréhension de ses propos. Il n’est pas simple de partir d’une idée «nue», infondée, considérée loufoque par certains, et de l’étoffer progressivement, lui donnant consistance par référence à des phénomènes naturels et des découvertes enregistrés dans l’histoire scientifique.  C’est ce que fait alors M. Demers avec le plus grand respect et gracieusement, permettant ainsi la poursuite de ma recherche. Non seulement mon chemin croisait-il celui d’un éminent savant aux connaissances universelles, pôle de référence pour plusieurs de ses pairs, mais de plus celui d’un être doté de qualités humaines.

 

Plusieurs années plus tard, une autre quête me conduit à nouveau vers M. Demers.  Cette fois-ci, il s’agit de définir ce qu’est un «système de couleurs», en vue d’élaborer la description d’une demande de brevet d’invention, reliée aux résultats de ma recherche sur les couleurs minérales. De cette rencontre, se dégage la même approche que celle initialement adoptée par M. Demers. Scrutant la nature des résultats et après mûre réflexion, il articule une définition du système de couleurs élaboré, en signalant les nombreuses caractéristiques.  

 

Je témoigne aussi de la contribution de M. Demers à l’éducation scientifique de plusieurs personnes en matière de couleur, à tout le moins dans le cadre du CQC. Ce centre spécialisé regroupe alors des peintres (entre autres, Pellan), des professeurs des niveaux collégiaux et universitaires, des scientifiques de sphères variées, des sculpteurs, photographes, psychologues, musiciens, un chimiste de la compagnie Sico, un responsable des décors et de l’éclairage à Radio-Canada, etc. Il m’est difficile d’exprimer en paroles ce dont j’ai été témoin, celles-ci étant trop limitatives, mais les rencontres organisées, étoffées et présentées par M. Demers étaient extrêmement «riches» en information et questionnement pertinents sur la couleur, appliquée à de multiples domaines scientifiques et artistiques. J’insiste sur le fait que nombreux sont ceux, provenant de différentes sphères de la société québécoise, qui venaient y puiser des renseignements sûrs et fondés, en vue d’articuler et de baliser leur démarche, de relancer leur inspiration, d’élaborer parfois même des publications.  M.  Demers s’assurait que toutes les sphères de la couleur soient abordées dans le cadre des réunions des membres et non-membres de tous les secteurs. Son activité spécialisée, soutenue et consistante, influençait les esprits bâtisseurs du Québec, en construisant par le fait même les trames intellectuelle, scientifique et artistique. Ses propos éclairants renforçaient la compétence des participant(e)s.  De plus, M. Demers contribuait à façonner l’image du Québec. Il participait (à) et organisait des conférences internationales sur la couleur avec des sommités, parfois même à son domicile. Son implication scientifique était totale.

 

J’affirme que son œuvre est importante. Il serait dommage que son rôle ne se perde dans la nuit des temps, alors que les témoins de son influence disparaissent  progressivement l’un après l’autre.

 

Par la présente, il m’importe de manifester un soutien total à la candidature de M. Pierre Demers, pour qu’il devienne le prochain récipiendaire du Prix Marie-Victorin et que la société québécoise reconnaisse dès lors sa contribution.  Un tel choix relèverait de la noblesse.  Il serait d’autant plus logique qu’il reçoive le prix, qui évoque l’œuvre du frère Marie-Victorin, car sa vie témoigne d’une même approche.  Les deux s’inscrivent dans la même lignée de la pensée scientifique.  En effet, n’est-ce pas là une seule et même approche que de prendre la science acquise pour la mettre à la disposition non seulement des scientifiques, mais aussi des novices en la matière?  Passionné par la connaissance scientifique, M. Demers a œuvré à la fois comme professeur universitaire, chercheur, diffuseur de connaissance autant auprès du monde scientifique académique que de la population, dont je suis un exemple probant.

 

Les faits susmentionnés me permettent conséquemment de croire que M. Pierre Demers répond aux exigences d’obtention du Prix Marie-Victorin et de formuler une demande à l’effet qu’il en soit récipiendaire pour l’année 2007.

 

Veuillez croire, Madame ou Monsieur, advenant que formuliez une réponse positive  à l’égard de ma requête, que je suis à votre entière disposition.

 

 

Respectueusement vôtre,

 

 

Paulette Tourangeau

25, Avenue de l’Épée,

App. 11,

Outremont (Québec)

H2V 3S8

Tél.:  (514) 273-9684