LE FRANAIS Ë LĠUNIVERSIT
En ce dbut dĠanne 2014,
trois numros du Devoir traitent de
lĠenseignement en franais lĠUniversit de Montral. Le premier (libre
opinion de Vincent Blais-Fortin, Ç LĠanglais lĠUdeM : complaisance excessive È, 29 janvier, p. A 81),
qui est annonc dans un article en une, dplore les entorses constates ce
qui devrait tre une rgle gnrale dans une universit francophone : que
lĠenseignement se donne intgralement en franais. LĠauteur dnonce le laisser
faire des professeurs de droit qui tolrent que certains tudiants rdigent
leurs rponses aux examens en anglais, non seulement la premire anne du bac
mais aussi en deuxime et mme en troisime anne. Et cela en contravention du
Rglement des tudes de premier cycle qui stipule pourtant Ç lĠobligation gnrale de
rpondre en franais. È
Question passionnante qui a
donn lieu pas moins de 75 commentaires sur le site du Devoir. On est en droit de se demander pourquoi ces anglophones et
allophones se sont inscrits une universit francophone sinon pour parler et
crire en franais ? SĠils ont lĠintention de faire carrire au Qubec,
nĠauront-ils pas rdiger leurs documents juridiques en franais ou
devront-ils constamment recourir aux services de confrres francophones ?
Suit le tmoignage dĠun de
ces privilgis qui, puis dit-il par la recherche du mot juste en franais,
avait obtenu de rdiger ses travaux en anglais (Michael Milech, Ç Anglophone lĠUdeM :
souplesse apprcie È, 31
janvier, p. A 92), mais qui se dit heureux dĠavoir tremp dans le
milieu francophone - peut-on parler dĠimmersion en prsence de telles
exceptions ? Heureux homme en effet que ce diplm en communication et science
politique qui affirme savoir maintenant qui sont Louis-Jos Houde et Vronique
CloutierÉ Dans un article de La Presse
(2014 01 24), M. Milech est prsent comme un crivain montralais3.
CĠest le recteur de la
facult de droit en personne, Guy Lefebvre, qui ferme la marche (Ç Accusations non fondes È, 3 fvrier, p. A 74).
Au sujet de son article invoquant des statistiques Ç rcentes È, un lecteur rappelle les
exigences mthodologiques en rpliquant quĠil est Ç difficile d'tre en dsaccord avec vous l-dessus puisque d'une
part, nous ignorons de quelle anne date[nt] vos statistiques et d'autre
part, il est difficile d'avoir les ides claires sur cette question-l quand
les statistiques sur lesquelles vous vous appuyez ne touchent qu' la rdaction
des examens. È LĠauteur du courriel, Patrick Boulanger, reproche son ambigut
au doyen par cette question troublante : Ç [É] pourquoi n'avez-vous pas compar vos plus rcentes
statistiques avec celles qui les prcdent pour tayer votre ide que Ç
[...] rien ne permet de conclure que lĠUniversit de Montral sĠanglicise ou
fait preuve de laxisme dans lĠapplication de sa politique linguistique. È
Non seulement le recteur sĠenveloppe
dĠun flou trs peu juridique en matire de statistiques, mais il ne rsout pas
notre perplexit avec les deux exemples quĠil cite lĠappui de son affirmation
selon laquelle Ç ces tudiants ont acquis non seulement une solide formation
juridique, mais galement une meilleure matrise de la langue franaise. È Nous laisserons
reposer en paix le premier, le feu juge en chef de la Cour suprieure du Qubec,
Allan B. Gold.
Du second des deux juristes que le
doyen vante dĠtre diplms de sa facult, il dclare quĠil a t Ç ministre de la Justice du Qubec et
juge la Cour suprieure. È Or, il sĠagit dĠHerbert
Marx5 et le doyen Lefebvre omet de
mentionner que ce dput libral avait
dmissionn de lĠAssemble nationale de Qubec en 1988, sur la question
linguistique prcisment. Les dputs anglophones sĠtaient levs contre le
projet de loi qui entendait imposer le franais comme langue dĠaffichage exclusive,
lequel fut invalid par la Cour
suprieure du Qubec et par la Cour suprme du Canada pour devenir la loi 1786,
o lĠon avait d se rabattre sur la nette prdominance du franais dans
lĠaffichage. Herbert Marx remit nanmoins sa dmission sur cette loi
linguistique mascule. En donnant Herbert Marx en exemple, le doyen Lefebvre
chante par consquent la gloire du loup qui on accorde crdit pour la gestion
de la bergerie. Notons que Robert Bourassa avait fait appel la clause
nonobstant pour passer cette loi mme diminue, mais quĠil ne lĠa pas reconduite en 19937
aprs les cinq ans statutaires. CĠest ce non-renouvellement qui explique la
libert tous azimuts que lĠon constate dans lĠaffichage lĠheure actuelle.
Pour revenir notre sujet,
nous avons ici un cas de dirigeant universitaire si comprhensif quĠil est prt
aller jusquĠ la capitulation. Bien entendu, il faut une certaine tolrance.
Par exemple, lĠUniversit de Sherbrooke permet les travaux en anglais pendant la
premire anne de certains programmes, mais il faut des rgles
claires pour que le franais reprenne ses droits par la suite. Faut-il voir
dans le prsent cas – on est ici en droit des affaires - un autre des ces
esprits coloniss qui, apparemment bahis
dĠtre parvenus aux plus hauts niveaux et assoiffs de voir leur envergure
reconnue, se montrent reconnaissants de ne pas tre passs sous le rouleau
compresseur de puissants matres penser anglophones ou anglophiles ? Malheureusement,
pour ce qui est du franais au Qubec, moult dirigeants ne reconnaissent pas
que la bergerie est menace et que lĠacceptation passive dĠune hybridation
linguistique galopante est suicidaire pour la poigne de francophones que nous
sommes en Amrique du Nord, contrairement aux 66 millions de Franais.
La meilleure faon de
conclure ce survol est de revenir aux nombreux commentaires dĠexcellente tenue
quĠon trouve sur le site du Devoir, comme celui-ci :
Bref, il est
probable que nous soyons d'accord sur un point : l'importance de l'anglosphre
est exagre et l'ouverture sur le monde par l'anglicisation est un leurre.
C'est plutt le contraire : en s'anglicisant, nous risquons fort de sombrer
dans l'unilinguisme individuel (ne pas confondre avec l'unilinguisme national),
ce qui va nous fermer des portes plutt que de nous en ouvrir. Les pays
anglo-saxons sont ceux ayant le plus haut taux de population incapable de
parler une deuxime ou troisime langue. Jean Richard,
29 janvier 2014.
Et
encore :
La
dcroissance des bonnes raisons de parler et de promouvoir le franais, en
voquant, particulirement, notre peu de fiert en tant que francophone dans un
Qubec franais, vient surtout de lĠidologie des dernires dcennies savoir
que le bonheur=succs=rentabilit ou profit et que cela passe par une seule
langue: lĠanglais. Une valeur de droite prne, au Qubec, particulirement par
le monde des affaires, parce que a fait son affaire. Comprenons par l,
parce que cĠest moins coteux, moins accaparant, moins exigeant et que cela
rapporte plus de fric (videmment pour les actionnaires!) Et cĠest alors
que toute la droite sĠy met (y inclus certains partis politiques, l'Institut
Fraser. l'Institut C.D. Howe, l'Institut conomique de Montral, les HEC,
etc.), si souvent avec une subtilit pernicieuse, pour en constater, au final,
une dprciation collective croissante. Il nĠy a rien de
mieux que de
culpabiliser pour mieux contrler!
Alors, par la force dĠune telle propagande ou dĠun tel travail dĠinfluence
ngative ÇundergroundÈ, comment les Qubcois en gnral, peuvent-ils avoir
une haute estime de ce quĠils sont et de ce quĠils peuvent devenir en se
rfrant leur culture et leur langue franaise malmenes et dprcies?
Inconsciemment tout au moins, un blocage sĠinstalle. Sauf en sachant et en tant
convaincus que le prsent nonc, cette idologie du Qubcois francophone
porteur d'eau, colonis, dpendant, est fausse, totalement fausse.
Comment? Avec des donnes, des chiffres, des valuations, plus que crdibles et
dont les sources sont incontestables. Pierre Pichette,
29 janvier 2014
Il nĠest pourtant que de
lire Charles Castonguay. Et de nous rappeler les propos prmonitoires de
Parizeau :
Car si on se dit non, on sera
de nouveau condamns la stratgie de la survivance, au repli dfensif pour
tenter de protger notre langue et notre culture avec les moyens du bord: ceux
d'une province, ceux d'un peuple non reconnu, d'un peuple condamn tre de
plus en plus minoritaire, avec tous les risques que comporte le statut
minoritaire.8 Jacques
Parizeau, en 1995
CĠest
le combat dans lequel le peuple qubcois demeure engag tant quĠil nĠaura pas
opt pour tre matre de sa langue et de son propre pays.
Hlne
Trudeau
Candiac
2014
02 08
Rfrences.
2- http://www.ledevoir.com/societe/education/398699/anglophone-a-l-udem-souplesse-appreciee
3- On le retrouve dans The Suburban cosignataire avec Me Irwin Cotler dĠune intervention
sur le projet de loi 60 : http://thesuburban.com/article.php?id=2429&title=Bill-60-Sends-A-Shameful
4- http://www.ledevoir.com/societe/education/398884/accusations-non-fondees
5- http://www.assnat.qc.ca/fr/deputes/marx-herbert-4377/biographie.html
6- http://www.axl.cefan.ulaval.ca/amnord/quebec-loi-1988-178.htm
7- Il
annona sa dmission le 14 septembre 1993 et Daniel Johnson fils lui succda le
11 janvier 1994. http://www.assnat.qc.ca/fr/patrimoine/chronologie/chrono86.html
8- http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Parizeau
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