Jugement Bouchard 1999
Jugement Pierre G. Bouchard
30 avril 1999
Ville Saint-Laurent c. Pierre Demers
Facture d'Orazio
CANADA PROVINCE DE QUÉBEC DISTRICT DE MONTRÉAL COUR MUNICIPALE DE VILLE
DE SAINT-LAURENT
No:PC-004 Par l'Honorable juge :
PIERRE G.BOUCHARD
Le 30 avril 1999
VILLE DE SAINT-LAURENT
c.
PIERRE DEMERS
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JUGEMENT
La demanderesse réclame du défendeur la somme de 4670,89$ en recouvrement d'un compte pour des travaux de gazonnement, d'enlèvement de terre, de gravier et de mauvaises herbes sur l'asphalte des espaces de
stationnement, de taille de la haie et d'émondage d'arbres, travaux
exécutés au 1200 rue Latour à Ville de Saint-Laurent.
Ces travaux font suite à leur non-exécution par le défendeur condamné par
une ordonnance de ce faire en Cour supérieure de Montréal le 26 novembre
1993, par l'honorable André Forget, ordonnance qui n'a pas été modifiée
en appel par la Cour d'Appel du Québec dans son jugement rendu le 26 juin
1997.
L'appel ne portait que sur l'ordonnance d'enlever un étalage de
bouteilles considéré par la Cour Supérieure comme une nuisance, le
présent défendeur n'ayant pas fait appel à l'encontre de l'ordonnance
d'enlever la végétation sauvage.
Le défendeur a produit une défense, plaidé que les travaux effectués
dépassent la portée du jugement de la Cour Supérieure, et réclamé en
demande-reconventionnelle la somme de 15,000,00$ en dédommagement pour empiètement et atteinte injustifiée sur son droit de propriété.
La contestation a été liée, et au début de l'audition le procureur de la
demanderesse a fait une requête verbale en irrecevabilité de la demande-reconventionnelle de 15,000,00$ qui n'a pas été contestée, le
procureur du défendeur ajoutant qu'il n'entendait pas présenter de
demande-reconventionnelle. Le Tribunal a alors pris acte de la requête
verbale en irrecevabilité de la demande-reconventionnelle et l'a accordée
mais sans frais vu le désistement verbal aussi de la
demande-reconventionnelle par le procureur du défendeur.
L'objet de la présente action tire sa source de cette partie de
l'ordonnance rendue verbalement par la Cour Supérieure le 26 novembre
1993 et transcrite le 22 décembre 1993 tel qu'en fait foi l'exhibit P-1
qui se lit ainsi :
"ORDONNE à l'intimé (Pierre Demers) de gazonner les bandes de terrain
situées dans les marges avant et de gazonner et de créer un aménagement
paysager sur tout autre espace non construit du terrain plus haut désigné
se situant autour du bâtiment, (soit en front au 1200 rue Latour et en
front sur la façade de la maison donnant sur la rue Rochon) le tout
conformément au réglement 1051 de la Ville de Saint-Laurent, et ce d'ici
le 15 mai 1994;
...
Au cas de défaut de l'intimé d'agir dans les délais fixés par la Cour,
AUTORISE la requérante (Ville de Saint-Laurent) à prendre elle-même, aux
frais de l'intimé, toutes les mesures requises pour donner suite au
jugement sur la présente requête."
L'ordonnance ci-devant faisait suite à une autre ordonnance où la Cour
disait :
"ORDONNE à l'intimé. [...] de prendre les mesures nécessaires pour
enlever de son terrain la végétation sauvage..."
En appel, la Cour d'Appel, dans son jugement du 26 juin 1997 produit
comme exhibit P-2, dit ceci :
L'ordonnance quant à la "végétation sauvage" s'inscrit dans la seconde
ordonnance que l'appelant ne conteste ps."
Le défendeur a été mis en demeure par lettre du 29 août 1997 des
procureurs de la demanderesse de procéder au nettoyage et au gazonnement
de son terrain conformément au jugement rendu par la Cour Supérieure, un
plan des lieux étant annexé à la mise en demeure, le tout produit en
liasse comme exhibit P-3.
A la demande de la demanderesse, des travaux y sont faits les 14 et 15
octobre 1997 par le contracteur D'Orazio et Frères Construction Inc,
lequel envoie à la demanderesse un compte de 4034,01$ le 27 octobre 1997,
compte produit come exhibit P-4.
Un ajustement de ce compte est ensuite effectué par la demanderesse en le
réduisant à la somme de 3892,41$ en déduisant plus précisément la
ristourne acordée en vertu de la Taxe sur les Produits et Services (TPS).
Cependant, la demanderesse y ajoute un montant de 778,48$ représentant
vingt pour cet (20%) à titre de frais de soutien, qu'elle réclame du
défendeur dans un compte produit comme exhibit P-5.
Finalement, une mise en demeure datée du 29 janvier 1998 est signifiée au
défendeur le 2 février 1998, laquelle est produite comme exhibit P-6, lui
réclamant la somme de 4570,89$, d'où l'action pour le même montant.
Après enquête et audition, le Tribunal a pris la cause en délibéré, et
quelques semaines plus tard, a requis des parties certaines
clarifications à faire quant aux travaux effectués les 14 et 15 octobre
1997.
Une audition s'est tenue le 9 février 1999, laquelle a permis de mieux
décrire par catégorie les travaux effectués et représentés par l'exhibit
P-7, soit : l'émondage des arbres, de la haie et de la vigne, la
préparation du terrain et l'enlèvement des arbres morts et des branches,
le gazonnement, le tout aussi décrit dans une lettre de John D'Orazio,
datée du 4 février 1999, et produite comme pièce P-8.
Le contracteur John D'Orazio a aussi témoigné et confirmé clairement que
l'émondage des arbres, de la haie et de la vigne avait été nécessaire
parce qu'ils envahissaient complètement et pour avoir accès aux endroits
à tourber tant le long de la haie sur les parties du terrain donnant sur
la rue Latour que le long de la rue Rochon. Son équipement ne pouvait pas
passer pour effectuer la préparation du sol et pour procéder à
l'enlèvement de la végétation sauvage, des mauvaises herbes, des arbustes
sauvages et des boîtes qui jonchaient le sol. Il confirme que le
nettoyage du terrain faisait partie de son contrat et qu'il l'a effectué
avec son équipement mécanique là où cela était possible, et de main
d'homme lorsque l'endroit était trop exigu.
La preuve révèle que le nettoyage du terrain a permis d'enlever la
végétation sauvage composée des mauvaises herbes et pousses d'arbustes
sauvages qui recouvraient entre autres des espaces asphaltés de
stationnement donnant sur la rue Latour et sur la rue Rochon.
Le chef de la division inspection de la demanderesse, Moshen Bishai, a
témoigné pour la demanderesse et confirmé avoir retenu les services du
plus bas de quatre (4) soumissionnaires, soit D'Orazio et Frères
Construction Inc. Il a lui-même supervisé en partie les travaux et a été
à même de constater que le terrain du défendeur était jonché de branches
mortes à l'avant et sur le côté gauche celui donnant sur la rue Rochon.
Il y avait de la terre, de la mauvaise herbe et de la végétation de
toutes sortes aussi sur la partie où subséquemment l'asphalte a été
nettoyé et mis à jour.
La haie était, dit-il, de quatre à cinq (4 à 5) pieds de large et d'une
hauteur de cinq à six (5 à 6) pieds, tant elle avait été laissée à
l'abandon.
La haie a dû être réduite à trois (3) pieds et trois (3) pouces ou un
(1) mètre de haut. Il confirme qu'il fallait la tailler pour pouvoir
gazonner. Il s'agissait, en outre, d'une question de sécurité pour un
coin de rue. Le défendeur a reconnu à l'audience ne rien avoir à redire à
ce sujet.
Monsieur Bishai ajoute qu'il a fallu enlever des branches et un arbre
mort et séché et confirme qu'il fallait enlever les mauvaises herbes
mêlées à la végétation sauvage et poussant non pas dans un agencement
paysager mais dans un ensemble absolument inculte et dénué d'entretien,
de ce que le Tribunal en a compris par la description faite, et
finalement nettoyer tout le terrain pour pouvoir le faire gazonner.
Monsieur Bishai y a vu des boîtes de polystyrène ("styrofoam") empilées
et des morceaux de briques. Il confirme aussi que les choses récupérables
ont été mises à l'arrière de la propriété.
Quant aux frais de soutien de vingt pour cent (20%) représentant 778,89$,
il dit les avoir réclamés en vertu d'une politique de la Ville lorsqu'il
s'agit de travaux de génie, admettant toutefois que ce n'est pas le cas
ici.
Pour sa défense, le défendeur soutient que le tout était un agencement
paysager de plantes et de fleurs exotiques. Il énumère une quantité de
sortes de plantes et de fleurs par leur nom d'horticulture, mais n'en
décrit aucunement de façon plus précise ni convaincante, leur agencement
paysager. Il ne fait pas mention de la végétation sauvage et des
mauvaises herbes, mais prétend enfin que les trois (3) arbres enlevés, un
(1) mort et deux (2) mourants, ne l'étaient pas, même si plusieurs
branches en étaient desséchées. Il reproche au contracteur de ne pas
avoir gazonné le trottoir en ciment de l'entrée privée conduisant à la
porte d'entrée. Il s'agit ici, selon le Tribunal, d'une question de gros
bon sens et le Tribunal n'entend pas le commenter plus avant, sinon pour
dire que que le défendeur se tourne lui-même en ridicule en ce faisant.
De l'examen de la preuve, le Tribunal est satisfait qu'il fallait dans un
premier temps dégager la haie, les arbres et la vigne, en les émondant et
en enlevant les arbres morts, pour pouvoir avoir accès au sol et en faire
la préparation pour le gazonnement.
L'émondage de la haie, même si monsieur Bishai en dit qu'il a dû aussi
être fait par mesure de sécurité, ce qui n'était pas dans l'ordonnance de
la Cour Supérieure, mais était incident et nécessaire pour pouvoir
gazonner le terrain jusqu'à la base ou le pied de la haie. Cela paraît
évident au Tribunal par la façon dont elle a été décrite par sa taille
inculte et dénuée d'entretien empiétant surtout sur l'espace du terrain à
gazonner.
En ce qui a trait à l'enlèvement des arbres morts ou mourants, le
tribunal est satisfait qu'il ne s'agit aucunement d'un caprice de la
Ville ou du contracteur ni d'un abus, mais d'une nécessité pour pouvoir
gazonner la marge latérale avant tant sur la rue Latour que sur la rue
Rochon conformément à l'ordonnance de la Cour Supérieure.
L'enlèvement des mauvaises herbes jonchant partout le terrain est un
prérequis tout à fait évident dans le respect du plus gros bon sens sans
avoir à être horticulteur ni paysagiste, pour pouvoir gazonner les marges
avant de la propriété tel qu'ordonné par la Cour Supérieure. Il va de soi
que certaines plantes et fleurs s'y trouvant ont dû aussi être enlevées
avec en plus des bulbes de fleurs enfouies sous la surface du sol et qui
n'avaient pas poussé; cependant, il s'agit d'un travail nécessaire causé
par l'absence d'entretien structuré et ordonné fruit de l'incurie la plus
totale du défendeur. Le défendeur n'a qu'à s'en prendre à lui-même et ne
peut pas invoquer sa propre turpitude.
Les travaux effectués ont été prouvés à la satisfaction du Tribunal,
aucune preuve n'étant soumise en défense pour en contredire la valeur.
L'action est donc bien fondée pour les travaux effectués jusqu'à
concurrence de la somme de 3892,41$ réclamée tenant compte du crédit de
325,00$ pour la partie arrière non exécutée et du crédit de taxe récupéré
par la demanderesse.
Qunt au montant de 778,48$, représentant le vingt pour cent (20%) réclmé
pour les frais de soutien, il n'y a aucune base légale sur laquelle la
demanderesse a pu appuyer sa réclamation, et une simple politique de sa
part exercée pour le soutien des travaux de génie, comme l'a reconnu
monsieur Bishai, ne saurait lui conférer de droit à cet égard. Cette
partie de la réclamation de la demanderesse sera donc refusée par le
Tribunal.
Quant à la demande d'indemnité additionnelle réclamée et prévue à
l'article 1619 du Code civil du Québec, vu la négligence évidente du
défendeur à ne pas respecter l'ordonnance de la Cour lui enjoignant
d'enlever la végétation sauvage et de gazonner l'avant et le côté de son
terrain en front sur les rues Latour et Rochon, le Tribunal considère ici
cette réclamation tout à fait justifiée. Il y a de toute évidence par la
preuve apportée en poursuite et l'absence de preuve à cet égard en
défense une certaine mauvaise foi de la part du défendeur.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
ACCUEILLE en partie l'action de la demanderesse;
REJETTE sans frais la demande reconventionnelle du défendeur;
CONDAMNE le défendeur à payer à la demanderesse la somme de 3892,41$ avec intérêts au taux légal, plus l'indemnité additionnelle prévue à l'article
1619 du Code civil du Québec à compter de la mise en demeure.
Le tout avec dépens.
(signé) PIERRE G. BOUCHARD, juge municipal
c.c. Me Pierre-Yves Leduc, procureur de la demanderesse
Me Luc Trempe, procureur du défendeur
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Pcc : Pierre Demers
Dimanche des Rameaux 16 avril 2000
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